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Pire, pour une minarchiste, américaine de surcroît, elle semblait ignorer complètement la problématique essentielle de ''comment éviter qu’un gouvernement ne déborde de ses tâches régaliennes''. Ainsi, l’histoire des États-Unis, après tout sans nul doute l’un des États fondés sur les principes les plus explicitement minarchistes qui soient, et l’échec patent de cette tentative, ne semblaient pas particulièrement l’intéresser. | Pire, pour une minarchiste, américaine de surcroît, elle semblait ignorer complètement la problématique essentielle de ''comment éviter qu’un gouvernement ne déborde de ses tâches régaliennes''. Ainsi, l’histoire des États-Unis, après tout sans nul doute l’un des États fondés sur les principes les plus explicitement minarchistes qui soient, et l’échec patent de cette tentative, ne semblaient pas particulièrement l’intéresser. |
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ou Pourquoi les libéraux ne sont pas randiens
Épistémologie
Ne pas appliquer l’individualisme méthodologique quand il faudrait...
Ayn Rand ne tirait pas toutes les conclusions apodictiques de l’individualisme méthodologique. Ainsi, elle prenait le collectivisme au sérieux :
- Le collectivisme affirme que l’homme n’a pas de droits : que son travail, son corps et sa personnalité appartiennent au groupe ; que le groupe peut faire de lui ce qui lui plaît, de quelque façon qu’il veut, au nom de quoi que ce soit qu’il décide être son propre bien-être. Par conséquent, chaque homme existe uniquement de par l’autorisation du groupe et pour l’intérêt du groupe.
- Ayn Rand, Manuel d’américanisme
Or, un groupe n’a pas d’intérêt, ni de bien-être, et ne décide rien du tout[2]. Ce genre de sophisme a été identifié correctement par Ludwig von Mises dans son livre d’épistémologie en tant que réification. Ayn Rand le comprenait certes [3] [4] mais n’en tirait malhereusement pas toutes les conclusions, donnant lieu à diverses erreurs :
- un respect indû pour les idéologies socialistes, comme si elles étaient des philosophies cohérentes, et non de simples prétextes ad hoc élaborés par des individus assoifés de pouvoir dans le cadre du marxisme culturel (comme si, d’ailleurs, leur éventuelle cohérence eût été une vertu) ;
- des personnages de ses romans qui s’en prennent à « la société » (un peu façon [5]), comme si celle-ci avait une opinion et des valeurs propres : « I will live in the world as it is, in the manner of life it demands. Not halfway, but completely. Not pleading and running from it, but walking out to meet it, beating it to the pain and the ugliness, being first to choose the worst it can do to me. » (Atlas Shrugged) ;
- une théorie de la « valeur objective », comme si la valeur n’était pas subjective et donc individuelle par définition (la même erreur se retrouve chez les écologistes et leur « valeur intrinsèque », une erreur critiquée notamment par George Reisman dans Capitalism [6]). Ayn Rand le comprenait en partie (« The concept “value” is not a primary; it presupposes an answer to the question: of value to whom and for what? »[7]), mais n’en tirait pas toutes les conclusions[8] ;
- un respect pour les États établis, en dépit de toute considération historique, comme si ceux-ci étaient bel et bien le reflet d’une « volonté collective » ;
- et naturellement son minarchisme, comme si une prise de décision « collective » sur un territoire arbitraire était possible (coïncidence amusante, c’est pour le think tank RAND que Kenneth Arrow en démontra l’absurdité[9]), comme si une délégation non-individuelle des droits était possible, comme si un État pouvait émerger (ou ait émergé historiquement) en respectant les droits individuels, etc, etc.
... et appliquer la rationalité individuelle quand il ne faudrait pas
Ayn Rand ne comprenait pas non plus les limites de la rationalité individuelle, connues au moins depuis Darwin, et approfondies par les apports de la psychologie évolutionniste[10] (auxquels Hayek, par exemple, s’intéressait déjà à la même époque[11], et que les libéraux et économistes autrichiens suivent de près depuis[12]), soit le fait qu’il y a des comportements qui ne sont pas explicables par une logique individuelle, mais par la logique de la sélection naturelle et sexuelle. Elle se réfère explicitement à la théorie de la « tabula rasa », dont la fausseté a été largement démontrée[13] (pour une bonne synthèse des motivations humaines réelles — dont la rationalité n’est qu’une partie — voir par exemple Prometheus Rising de Robert Anton Wilson[14]).
Elle tombait ainsi tout droit dans ce que Harry Browne (un candidat du Libertarian Party tant honni) a identifié correctement comme « le piège intellectuel » (The Intellectual trap)[15], soit celui de chercher à rationaliser des émotions, désirs, etc, qui ne relèvent pas d’une décision consciente et rationnelle, mais sont le fruit de facteurs psychologiques (programmation génétique, « imprints », etc.). Ayn Rand adopte une position de rationalisation extrême, comme si tomber amoureux (le verbe n’est pas anodin) ou même avoir une orientation sexuelle donnée étaient des choix conscients.
Le lecteur avisé trouvera ainsi particulièrement niais le chapitre 4 de Virtue of Selfishness (« The Conflicts of Men’s Interests ») où elle prétend démontrer qu’il n’y aurait pas de conflit d’intérêts entre les hommes (rationnels, cela va sans dire).
Il apprendra ainsi que :
- Thus, when a rational man pursues a goal in a free society, he does not place himself at the mercy of whims, the favors or the prejudices of others; he depends on nothing but his own effort: directly, by doing objectively valuable work—indirectly, through the objective evaluation of his work by others.
Le producteur qui voit soudain ses produits passés de mode sera rassuré d’apprendre que c’est leur « valeur objective » qui a changé.
Une analyse du sujet un peu plus sérieuse : [16] — ou encore : [17].
De même que les socialistes ne comprennent pas les jeux à somme positive[18], Ayn Rand semble ne pas comprendre les jeux à somme nulle (et encore moins à somme négative, pourtant souvent choisis comme le montre l’économie expérimentale), ni la rareté (d’intérêt pourtant essentiel pour l’économie et les droits de propriété), ni même l’importance du hasard (esthétiquement, on préférera à ce propos d’autres écrivains[19] ), ni même, tout simplement, la subjectivité des préférences (cf. Rothbard [20]). Ainsi, on ne « décide » pas de préférer le rouge au violet ou le Bordeaux au Beaujolais, il n’y a rien d’objectif, de rationnel ou d’éthique dans l’une au l’autre préférence, et il n’y a rien de moral, de juste ou de méritocratique au succès ainsi résultant du producteur respectif de l’un ou de l’autre — c’est tout simplement la réalité des différences individuelles de préférence, qui existent et n’ont pas à être « rationelles » pour être respectables.
Éthique
Dans Virtue of Selfishness, Ayn Rand élabore une théorie de ce qu’elle appelle « éthique » , synonyme de « morale »:
- What is morality, or ethics? It is a code of values to guide man’s choices and actions—the choices and actions that determine the purpose and the course of his life. Ethics, as a science, deals with discovering and defining such a code.
Une problématique purement individuelle, donc :
- Since reason is man’s basic means of survival, that which is proper to the life of a rational being is the good; that which negates, opposes or destroys it is the evil.[21]
Mais comment déterminer ce qui est « proper » et ce qu’il ne l’est pas ? Blank out — comme elle dirait — en fait une sorte d’anti-concept à la « dignité humaine » (« ce qui est digne pour un homme »).
Heureusement, elle nous offre un exemple :
- I like to think of fire held in a man’s hand. Fire, a dangerous force, tamed at his fingertips. I often wonder about the hours when a man sits alone, watching the smoke of a cigarette, thinking. I wonder what great things have come from such hours. When a man thinks, there is a spot of fire alive in his mind—and it is proper that he should have the burning point of a cigarette as his one expression.
- Ayn Rand, Atlas Shrugged
Autrement dit, il convient à un homme pensant, donc rationnel, de se détruire les poumons. Et il est « moral » d’encourager autrui à faire de même[22] :
- Ayn Rand’s personal life was consistent with her philosophy of not giving a shit about anybody but herself. Rand was an ardent two-pack-a-day smoker, and when questioned about the dangers of smoking, she loved to light up with a defiant flourish and then scold her young questioners on the “unscientific and irrational nature of the statistical evidence.” After an x-ray showed that she had lung cancer, Rand quit smoking and had surgery for her cancer. Collective members explained to her that many people still smoked because they respected her and her assessment of the evidence; and that since she no longer smoked, she ought to tell them. They told her that she needn’t mention her lung cancer, that she could simply say she had reconsidered the evidence. Rand refused.
(Rand elle-même disait : « My personal life is a postscript to my novels; it consists of the sentence: ’And I mean it.’ ».)
L’autre problème étant la nature circulaire de la définition :
- Since reason is man’s basic means of survival, that which is proper to the life of a rational being is the good; that which negates, opposes or destroys it is the evil.[23]
Ainsi, ce qui permet à l’homme de survivre est sa raison, donc survivre est raisonnable... Mais justement, puisque la raison est un instrument individuel, comment juger extérieurement si les choix sont « rationnels », au-delà du critère de simple survie ? On retrouve là une sorte de mépris de la rationalité des autres — et là aussi, un peu de saine humilité hayékienne lui aurait été fort profitable. (Voir aussi Droit#Le_Droit_comme_Droit_naturel.)
Moralité de l’orientation sexuelle
Ainsi, Rand considérait des comportements que elle n’aurait pas choisis comme immoraux, comme par exemple l’homosexualité [24] [25]. Avec quelle justification rationnelle, objective, etc ? L’homosexualité empêche-t-elle donc de vivre, survivre, vivre rationnellement, et même se reproduire ? Ayn Rand ne prit jamais la peine de fournir d’explications, si ce n’est :
- It involves psychological flaws, corruptions, errors, or unfortunate premises.... Therefore I regard it as immoral ... And more than that, if you want my really sincere opinion. It’s disgusting. [26]
Un argument d’une telle profondeur intellectuelle, d’une telle objectivité, qu’il fut repris tel quel par le président ougandais en 2014 [27]. Un brillant intellectuel objectiviste qui s’ignore !
En effet :
- And openly gay Arthur Silber who currently writes the engaging “Light of Reason” weblog, summed it up to Sciabarra, “Rand did have an extremely unfortunate tendency to moralize in areas where moral judgments were irrelevant and unjustified. ... especially in ... aesthetics and sexuality.” [28]
Ayn Rand, contrairement au président ougandais, ne commettait certes pas le non sequitur de déduire de ses préférences des persécutions légales. En revanche, ce qui est problématique est sa rationalisation ex post de ses propres préférences subjectives dans le cadre d’une philosophie qu’elle prétend par ailleurs intégrée, objective, et surtout justifiable rationnellement de A à Z.
Moralité de la prostitution
- Q: Should dope peddling, bootlegging, gambling, and prostitution be forbidden by law? ...
- A: ... No, they should not be forbidden. Some of these practices are improper. Prostitution is evil by almost any standard of morality.
- Ayn Rand Answers, p. 13
La prostitution soulève l’indignation de Rand, de même que celle de ses disciples (cf. Schwartz supra), mais ils ne prennent jamais la peine d’expliciter ce qu’ils peuvent bien lui reprocher, selon leur propre théorie de la morale — leur critique ne dépasse jamais un vulgaire mépris de la rationalité des autres.
En effet, pour Ayn Rand est immoral ce qui est irationnel, et vice versa. Ainsi, il serait immoral et irrationnel pour une femme de vouloir se prostituer — au même titre d’ailleurs que de devenir présidente des États-Unis (cf. infra).
Moralité du mariage
- Q: What is your view of laws prohibiting homosexuality and bigamy?
- A: All laws against homosexual acts should be repealed. I do not approve of such practices or regard them as necessarily moral, but it is improper for the law to interfere with a relationship between consenting adults. Laws against corrupting the morals of minors are proper, but adults should be completely free.
- Bigamy is a different issue. If a man wants a relationship with two women, he does not need the law to sanction it. But the state should have standards about what it considers a legal marriage. The law should be uniform, and there are good reasons why in most civilized countries marriage is a monogamous institution. If a man wants a wife and another woman, he doesn’t need the legality of bigamy if he’s open about it. Bigamy laws concern cases in which a man has two legal wives in two different cities, and leads a double life. Here there are good grounds, legally and morally, to prosecute him. (Freedom Hall Forum, 1968, Ayn Rand Answers, p. 18)
On découvre ainsi une nouvelle tâche régalienne de l’État « limité » randien : légifèrer sur le mariage[29].
Et à nouveau, nous retrouvons les conséquences de sa définition confuse de la morale. De deux choses l’une en effet :
- soit la morale est effectivement quelque chose de rationnel et objectif, comme elle le prétend, et alors il faudrait qu’elle fournisse de meilleurs arguments que ce que elle approuve ou considère comme moral ;
- soit la morale est subjective et personnelle, auquel cas, libre à elle d’avoir ses convictions, mais qu’elle nous épargne alors de les mélanger[30] [31] avec une philosophie à usage universel.
Ainsi, on se demande ce qu’elle peut bien entendre par « corrupting the morals of minors » — selon sa définition de la morale :
- The purpose of morality is to teach you, not to suffer and die, but to enjoy yourself and live[32].
Et quelles seraient donc ces raisons légales pour pénaliser la polygamie ? Pire, quel est donc cet anti-concept d’avoir des raisons morales (donc distinctes du Droit) pour condamner pénalement quelqu’un ? Une nouvelle fois, nous retrouvons la classique confusion entre préférences personnelles, développement personnel, morale, et (le plus grave) Droit [33] [34] [35].
On notera en revanche que l’adultère ne semblait pas lui poser de problème moral particulier [36] — on comprend mieux pourquoi, pour elle, la « moralité » serait plus utile sur une île déserte qu’en société.
La valeur-travail
Une valeur absolue semble être le travail, et notamment le « travail bien fait » :
- there’s nothing of any importance in life—except how well you do your work. Nothing. Only that. Whatever else you are, will come from that. It’s the only measure of human value. All the codes of ethics they’ll try to ram down your throat are just so much paper money put out by swindlers to fleece people of their virtues. The code of competence is the only system of morality that’s on a gold standard. When you grow up, you’ll know what I mean.
- Ayn Rand, Atlas Shrugged
Le choix d’un travail respectant le Droit ? Secondaire... (voir faire son travail et argent facile). À nouveau, ceci est visible chez les personnages principaux de ses romans, poussé à son paroxysme par Roark, dont la philosophie morale semble se résumer à celle d’un workaholic hédoniste[37] qui ne se pose aucune question, dès lors qu’il peut faire ce que par hasard il aime — son travail, l’architecture (là aussi, faut-il le rappeler : le fait qu’il aime son travail — un travail donné — est une simple émotion innée ou acquise aléatoirement, et non le fruit d’une décision consciente et rationnelle à valeur morale). Il ne se demanda pas par exemple si son travail sert à des projets respectant le Droit, financés sans vol (Cortlandt), ni même si ses commanditaires sont des personnes un tant soit peu morales (Wynand). Il ne se soucie même pas si son travail sert ses propres intérêts rationnels à long terme (ce qui serait, au moins, cohérent avec la pseudo-morale randienne), et encore moins s’il contribue à une société meilleure en général ou relève de choix universalisables.
Nous pourrions même nous demander ce qu’il y aurait à redire, pour Rand, à la théorie keynésienne de créer de l’emploi en creusant des trous pour les remplir — dès lors que les trous seraient bien creusés.
L’égoïsme
- You who prattle that morality is social and that man would need no morality on a desert island—it is on a desert island that he would need it most. Let him try to claim, when there are no victims to pay for it, that a rock is a house, that sand is clothing, that food will drop into his mouth without cause or effort, that he will collect a harvest tomorrow by devouring his stock seed today—and reality will wipe him out, as he deserves; reality will show him that life is a value to be bought and that thinking is the only coin noble enough to buy it.[38]
L’éthique/moralité est ainsi confondue avec une sorte de mélange entre métaphysique (pourtant identifiée correctement comme branche distincte de la philosophie [39] (voir La philosophie : qui en a besoin) !) et simple développement personnel ou choix de vie. Quid de la morale dans les rapports aux autres ? Mystère — après tout, la « morale » est plus utile sur une île déserte que dans une ville !
En fait, toute la problématique des rapports moraux entre des êtres humains réels (partiellement rationnels) est complètement écartée, en proclamant tout simplement qu’il n’y aurait « pas de conflits d’intérêts entre les hommes », ceux-ci étant tous rationnels. Or, la rationalité n’est bien entendu pas binaire d’une part, et n’empêche certainement pas les conflits d’intérêt d’autre part — c’est justement l’objet de l’éthique de se demander comment faire le tri entre les actions des uns et des autres, non pas en fonction de celles qui sont rationnelles, mais selon celles qui sont morales.
Droit
Ayn Rand défendait un État « minimal », financé volontairement, mais néanmoins coercitif de par son monopole sur un territoire donné [40]. Elle n’a jamais expliqué :
- ni comment serait déterminé ce territoire[41] ;
- ni comment seraient prises les décisions de l’État régnant sur ce territoire, par quelle magie le théorème d’Arrow serait contourné (après tout, ne s’agit-il pas d’être objectif ? Comment décider « objectivement » du système électoral ([42]), des cironscriptions ([43]), etc ?) ;
- ni comment un monopole pourrait exister sans violation de droits.
Sa justification de l’État n’a ainsi jamais dépassé le niveau d’un vulgaire sophisme du chat-qui-aboie en théorie, et d’un sophisme de l’épouvantail inversé en pratique (aucun État existant ne répond à ses critères, mais elle ne les rejetait pas pour autant ; voir État digne de ce nom).
Pire, pour une minarchiste, américaine de surcroît, elle semblait ignorer complètement la problématique essentielle de comment éviter qu’un gouvernement ne déborde de ses tâches régaliennes. Ainsi, l’histoire des États-Unis, après tout sans nul doute l’un des États fondés sur les principes les plus explicitement minarchistes qui soient, et l’échec patent de cette tentative, ne semblaient pas particulièrement l’intéresser.
Plus particulièrement, la question essentielle (pour un minarchiste !) du droit constitutionnel, étudiée de près par les libéraux, ne semblait pas la préocupper. Ainsi, de l’importance des 10e amendement (principe de subsidiarité), 1er amendement (liberté d’expression), et surtout, 2e amendement (RKBA). Ni l’importance du respect des constitutions (voir illusion constitutionnaliste), ni ses limites, ne semblaient l’avoir préccupée.
Droit de porter des armes
- Q: What is your opinion of gun control laws?
- A: I do not know enough about it to have an opinion, except to say that it is not of primary importance. Forbidding guns or registering them is not going to stop criminals from having them; nor is it a great threat to the private, non-criminal citizen if he has to register the fact that he has a gun. It is not an important issue, unless you’re ready to begin a private uprising right now, which isn’t very practical. [Ford Hall Forum, 1971]
- Q: What’s your attitude toward gun control?
- A: It is a complex, technical issue in the philosophy of law. Handguns are instruments for killing people — they are not carried for hunting animals — and you have no right to kill people. You do have the right to self-defense, however. I don’t know how the issue is going to be resolved to protect you without giving you the privilege to kill people at whim. [Ford Hall Forum, 1973] (Ayn Rand Answers, p. 19, « Gun control ». Voir aussi les commentaires sur [44]).
Eh bien non, ce n’est pas une question technique compliquée, c’est une simple question de Droit [45], d’importance politique cruciale qui plus est[46], et une Américaine n’a aucune excuse pour l’ignorer [47].
Conscription
- Q: Should amnesty be granted to draft dodgers or deserters?
- A: It is improper to discuss this issue while there’s a war going on. It’s a complex issue. But when men are dying in a war, you cannot promise amnesty to those who refused to fight. I don’t blame those who refuse to be drafted, however, if they did so out of genuine convictions (not necessarily religious). If someone opposed the state’s right to draft him, he’d be right, and would go to jail. (Ford Hall Forum, 1972, Ayn Rand Answers, p. 91).
On notera le fait amusant qu’une « objectiviste » se préocuppe des motivations personnelles d’une personne dans l’exercice de ses droits.
Là aussi, ce n’est absolument pas une question complexe, mais une simple question de Droit : chacun est libre de disposer de son temps à sa guise, selon les raisons qui ne regardent que lui, et quiconque l’en empêche par la force est un criminel.
Comme l’écrivait le libéral Benjamin Constant 150 ans avant elle, dans sa définition de la liberté :
- C’est pour chacun le droit de dire son opinion, de choisir son industrie, et de l’exercer, de disposer de sa propriété, d’en abuser même; d’aller, de venir sans en obtenir la permission, et sans rendre compte de ses motifs ou de ses démarches.
Là encore, Rand le comprenait théoriquement (voir « Draft » dans Ayn Rand Lexicon, pp. 127-129), mais n’en tirait pas toutes les conséquences pratiques qui s’imposent (si la conscription est contraire au Droit, alors tout un chacun est dans son bon droit en la refusant, et quiconque la met en pratique est un criminel, et un État qui le fait ne correspond dès lors pas à sa définition du « bon » gouvernement respectueux du Droit).
De plus, une guerre n’est pas décidée par un pays, elle est décidée par certains individus qui décident d’envoyer d’autres individus, en l’occurence contre leur gré, combattre et risquer leur vie. Là encore, on retrouve les conséquences de type homme de paille inversé du refus de tirer les conséquences de la réalité : les États-Unis ont ils un gouvernement respectueux du droit au sens de Rand, ou ne l’ont-ils pas ?
Droit contre droit pénal
Ayn Rand ne semblait avoir rien à redire [48] [49] au droit pénal.
Pseudo-propriété intellectuelle
Ayn Rand soutenait la pseudo-propriété intellectuelle, au détriment des droits de propriété véritables.[50]
Politique
Comme nous l’avons vu, Ayn Rand comprenait beaucoup de choses en philosophie politique, mais peinait à en tirer les conclusions pratiques pourtant évidentes. Elle semblait ainsi abhorrer particulièrement, de manière parfaitement irrationnelle, les libéraux qui, eux, les comprenaient — autre paradoxe pour celle qui définissait l’objectivisme comme « une philosophie pour vivre sur Terre ».
Surtout, l’impératif moral de contribuer à un monde où le Droit sera davantage respecté (moins d’innocents en prison, moins de crimes impunis, etc), et soutenir les démarches qui abondent concrètement dans ce cens, ne semblait pas la toucher — certes, cela ne rentre pas nécessairement dans sa définition de la morale.
Naïveté philosophique
Ayn Rand ramenait tout à la philosophie, et voulait tout expliquer par la philosophie. En politique cela se traduisait par une naïveté consistant à prendre pour argent comptant les déclarations des politiciens [51].
Plus généralement, Ayn Rand semblait ignorer aussi bien les apports de la psychologie évolutionniste que ceux de l’école des Choix publics. Nous avons vu aussi que l’Histoire (l’émergence historique de l’État par exemple) ne l’intéressait pas spécialement. Ainsi, elle ne comprenait pas que les « philosophies », les « morales », les « religions » et même les « théories économiques »[52] sont bien souvent des rationalisations ex post d’intérêts particuliers et d’états de fait. Les différents lobbies, syndicats, etc, ne sont pas mûs par des idéologies ou des principes philosophiques, mais simplement par la défense de leurs intérêts (un fonctionnaire dont le travail consiste à rédiger de nouvelles lois, par exemple, ne va pas vouloir perdre son travail) — cui bono :
- If you ever wonder why people around you are behaving strangely, or believing and doing seemingly irrational things, you can find the answer by asking the question: what’s in it for them? It’s remarkable the extent to which people craft their own opinions and decisions around their own desires and interests, regardless of considerations of truth, evidence, or logic.
Cela vaut aussi pour le collectivisme : quels sont les régimes où certains individus ont le plus de pouvoir ? Avec le plus de culte de la personalité, la célébration quasi-mystique de quelques individus égoïstes par des millions de personnes ? Les prétendus régimes collectivistes. Ce n’est donc pas une lutte idéologique : l’enjeu principal dans le monde n’est pas (Manuel d’américanisme) entre deux philosophies cohérentes qui s’opposeraient, et une fois que les tenants de l’une convaincraient ceux de l’autre, la première serait acceptée par l’ensemble de la société et mise en pratique[53].
Non, c’est bien plutôt une lutte entre les producteurs et les voleurs, et le but n’est pas de convaincre les voleurs qu’ils ont tort, mais de faire en sorte qu’ils cessent de nous voler :
- Which brings me to the essential : the goal is not to convince statists that we are right and they are wrong. The goal is to win. The goal is for statists to be powerless, not to acknowledge their powerlessness.
- We are not the student who comes questioning the master about some doubt he has about the rightness of his system. We are free people who don’t give a damn about the looters. Our goal is not to convince criminals, including statists, that they are wrong. Our goal is to have a society where all criminals, including statists, are rightfully defended against and made to pay for their crimes.
Naturellement, cela peut passer par « convaincre les voleurs » que voler c’est mal. Cela peut aussi passer par l’agorisme (et le bitcoin est incontestablement le plus grand progrès pour la liberté de ces dernières décennies, obtenu sans avoir dû convaincre le moindre étatiste). Et cela peut passer par des alliances politiques purement pragmatiques.
Ayn Rand et les libéraux
Ayn Rand se montrait extrêmement critique des libéraux [54]. Ainsi à propos de Milton Friedman :
- I saw five minutes of it [Free to Choose]; that was enough for me, because I know [Milton] Friedman’s ideas. He is not for capitalism; he’s a miserable eclectic. He’s an enemy of Objectivism, and his objection is that I bring morality into economists, which he thinks should be amoral. I don’t always like what public television puts on, but they have better programs than ‘Free to Choose’ – the circus, for instance.
À propos des libéraux en général :
- They’re not defenders of capitalism. They’re a group of publicity seekers who rush into politics prematurely, because they allegedly want to educate people through a political campaign, which can’t be done. Further, their leadership consists of men of every persuasion, from religious conservatives to anarchists. Most of them are my enemies: they spend their time denouncing me, while plagiarizing my ideas. Now it’s a bad sign for an allegedly pro-capitalist party [Libertarian Party] to start by stealing ideas.
- I don’t think plagiarists are effective. I’ve read nothing by libertarians (when I read them, in the early years) that wasn’t my ideas badly mishandled – that is, the teeth pulled out of them – with no credit given. I didn’t know whether to be glad that no credit was given, or disgusted. I felt both. They are perhaps the worst political group today, because they can do the most harm to capitalism, by making it disreputable. I’ll take Jane Fonda over them.
Ayn Rand et les candidats à la présidentielle
Bien que se réclamant d’un État minimal financé volontairement, Ayn Rand ne semblait avoir aucun problème à voter pour divers candidats plus ou moins socialistes (à commencer par FDR), qui ont tous, durant sa vie, accroît le pouvoir de l’État américain (durant le demi-siècle qu’elle a vécu aux États-Unis, le poids de l’État a triplé, d’environ 11% à 33% du PIB...[55]), non seulement en contradiction flagrante avec le Droit libéral, mais même avec toute notion randienne d’État se limitant à faire respecter le droit, et même avec toute notion un tant soit peu conservatrice d’un État constitutionnellement limité [56][57].
Élection de 1972
- Question: Have you heard of the Libertarian Party and would you consider endorsing John Hospers and Tonie Nathan as presidential candidates?
- Rand: Look, I would rather vote for Bob Hope or the Marx brothers, if they still exist, or Jerry Lewis - I don’t know who is the funniest today, rather than something like professor Hospers and the Libertarian Party. Look, I don’t think Henry Wallace is a great thinker but even he - he’s pretty much of a demagogue, though with some courage - even he had the good sense to stay home this time if he wanted to some extent - if he had one ounce of sincerity and wanted some freedom for his country. To choose this year to start after personal publicity - and if Hospers and whoever the rest are get ten votes away from Nixon, which I doubt, but if they do it is a moral crime. [Ford Hall Forum, 1972]
Rand, en effet, soutenait Nixon (voir [58] ... on notera d’ailleurs l’échec objectivement flagrant de l’ensemble de son engagement politique de par ses efforts pour des candidats opposés d’une élection à l’autre, annihilant ainsi par définition ses propres efforts précédents — là aussi, si elle avait compris les conclusions du Droit libéral, ou un minimum des motivations psychologiques réelles des politiciens — non pas une philosophie quelconque, mais le pouvoir — elle se serait abstenue).
Nixon, donc, instigateur de la guerre à la drogue — activité criminelle (et parfaitement anticonstitutionnelle, sans même parler de ses véritables motivations [59]) de l’État fédéral américain, qui offrit aux États-Unis le triste privilège de la première population carcérale du monde, aussi bien en termes relatifs qu’absolus (certains ont même comparé ce taux à celui de l’URSS sous Staline [60]), ainsi que d’incalculables dommages humains et économiques [61] ne lui semblait pas un enjeu suffisamment important pour lui préfèrer d’autres candidats — celui du Libertarian Party, par exemple.
Élection de 1976
Lors d’une séance de questions, un auditeur lui a demandé ce qu’elle pensait du candidat du Parti libéral américain (Libertarian Party), Roger MacBride.
Sa réponse :
- Now, why would I be opposed to [libertarians]? Because I have been saying (...) the same thing in everything I’ve spoken or written: that the trouble in the world today is philosophical ; that only the right philosophy can save us. And here is a party which plagiarizes some of my ideas, mixes it with the exact opposite – with religionists, with anarchists, with just about every intellectual misfit and scum that they can find – and they call themselves ‘libertarian’ and run for office. Just let me add: I dislike Mr. Reagan. I dislike Mr. Carter. And I’m not too enthusiastic about the other candidates. I would say the worst of them are giants compared to anybody who would attempt anything so unphilosophical, so low, and so pragmatic, as this libertarian party because it’s the last insult to the idea of ideas, and to philosophical consistency. [62] (Q&A @5:30-7:00)
Les autres candidats [63] étant, en plus du « démocrate » et du « républicain » :
- Eugene McCarthy, a former Democratic Senator from Minnesota, ran as an independent candidate.
- Ben Bubar, Prohibition Party nominee.
- Frank Zeidler, former mayor of Milwaukee, Wisconsin, ran as the nominee of Socialist Party USA, which was founded in a split with Socialist Party of America.
Autrement dit, Rand considérait comme des « géants » (sic) — préférables à un authentique candidat libéral — un socialiste et un prohibitionniste.
Quel était donc le programme du libéral ?
- a free market system, a return to the gold standard, the abolition of the Federal Reserve, an end to corporate welfare, the abolition of the FCC, a foreign policy of non-interventionism, and abolishing all victimless crimes.[64]
À chacun de juger ce que Rand pouvait bien lui trouver de si terrifiant.
Candidates féminines
- I do not think that a rational woman can want to be president. Observe that I did not say she would be unable to do the job; I said that she could not want it. It is not a matter of her ability, but of her values.
- Ayn Rand, « About a Woman President », in The Voice of Reason: Essays in Objectivist Thought, 1988.
L’argument de Rand étant que le rôle d’une femme est d’admirer les hommes (sic), ce qui lui serait rendu difficile en accédent à un poste aussi élevé... Mais quid alors d’une présidente lesbienne ? Ah non — celle-ci serait irrationnelle de toutes façons, l’homosexualité étant immorale et donc irrationnelle pour Rand (sic).
On notera aussi que pour ce genre de questions comme pour tant d’autres, nous sommes en plein dans le sophisme de l’État digne de ce nom : si les États-Unis ne sont pas un État conforme aux principes randiens, pourquoi donc une personne rationnelle voudrait-elle accéder à la présidence sinon pour réformer l’État d’une manière radicale ? Et pourquoi dès lors se préocupper du sexe de cette personne, et en bavarder comme si de rien n’était, comme si la situation était tout à fait normale, et non plutôt constater l’urgence de mettre fin aux violations d’un État qui ne correspond pas à l’État légitime randien ?
Dérive sectaire
Disciples
Les disciples de Rand se bornent généralement à répéter les mêmes (non-)arguments (littéralement, sans même les reformuler) et commettent ainsi les mêmes erreurs.
Leonard Peikoff
Peter Schwartz
Peter Schwartz, « Libertarianism: The Perversion of Liberty » in The Voice of Reason: Essays in Objectivist Thought, 1988.
Sa seule critique correcte est celle des opinions en politique étrangère de Murray Rothbard, lesquelles sont bien entendu en contradiction avec sa propre théorie (correcte) de l’État : puisque celui-ci est un gang de criminels, alors 1) celui-ci ne nous demande pas particulièrement notre avis sur les conflits qu’il mène avec d’autres gangs (on n’est pas obligé d’avoir une opinion sur le sujet) ; 2) dans les luttres avec d’autres gangs, certains sont pires que d’autres, encore faut-il savoir lesquels ; 3) ceci ne saurait être déterminé a priori, ni faire l’objet d’une preuve définitive (voir Murray_Rothbard#Les_sophismes_isolationnistes).
Pour le reste, Schwartz nous offre la répétition habituelle des non-arguments randiens, faits d’épouvantails, d’invectives, et (soyons indulgents) de mauvaise foi crasse. Par exemple :
- In fact, there is no essential distinction between dictatorship and Libertarianism. The totalitarian maintains that the state may do whatever it wishes, without any restraints; the Libertarian insists that the individual may do whatever he wishes, without any restraints. Both agree that man is to be ruled by whim, and differ only on whether private whim or government whim takes precedence.
Les randiens reprochent alternativement au libéralisme de se cantonner au principe de non-agression — et de prôner l’agression sans limite. Pour leur théorie de l’État en revanche, on attend toujours... Nous retrouvons encore et toujours les mêmes sophismes et erreurs basiques : un État n’a pas de « whim » (caprice), seuls les humains en ont. Ainsi, le libéral insiste sur son droit d’agir selon ses caprices — dès lors qu’il respecte la propriété d’autrui, et reconnaît ce même droit aux autres : qu’ils fassent ce que bon leur semble, dès lors qu’ils respectent sa propriété. Est-ce si compliqué à comprendre ?
Le « totalitaire » souhaite que lui puisse faire ce qu’il veut, y compris commettre des agressions, et que tous les autres soient soumis à des règles — principalement celle de ne pas en commettre contre lui, bien entendu.
Yaron Brook
Yaron Brook, directeur du Ayn Rand Institute, critique Ron Paul [65]
Gregory Salmieri
Conclusion : la différence profonde entre le randianisme et le libéralisme
- Libertarianism is concerned with the use of violence in society. That is all. It is not anything else. It is not feminism. It is not egalitarianism (except in a functional sense: everyone equally lacks the authority to aggress against anyone else). It has nothing to say about aesthetics. It has nothing to say about religion or race or nationality or sexual orientation. It has nothing to do with left-wing campaigns against “white privilege,” unless that privilege is state-supplied.
Le randianisme (« objectivisme ») se veut une philosophie complète, allant jusqu’à avoir des préceptes sur l’esthétique (l’art), les objectifs de vie personnels, la sexualité, etc. Surtout, il met la rationalité (ou plutôt, ce que Rand considérait comme tel) au dessus de tout, avec une acceptation complète de sa philosophie comme objectif primordial.
Comme nous l’avons vu, les considérations d’ordre pratique de la politique (réduire l’injustice étatique) passent ainsi au second plan (des mesures politiques et des candidats allant dans le bon sens sont rejetés dès lors qu’ils ne seraient pas « philosophiquement cohérents »).
Les alliances[66] (ou même les relations personnelles ![67]) avec par exemple les conservateurs chrétiens sont ainsi rejetées.
Les libéraux, en revanche, ont un objectif beaucoup plus modeste — faire respecter le Droit, autrement dit, réduire l’injustice et la criminalité impunie dans le monde :
- Libertarian progresses throughout history have not been about changing peoples’ religions, they have been about ending state religions. Not about ending racism, but about ending slavery. Not about ending homophobia, but about ending sodomy laws. Our first job as libertarians is not changing people’s opinions and preferences, but convincing people to not use aggression so lightly.
L’existence de diverses religions, opinions, préférences, choix de vie, qu’ils soient (aux yeux de qui, d’ailleurs ?) rationnels ou non, n’est absolument pas un problème pour le libéralisme — pour autant que tous respectent le Droit.
Le programme libéral est ainsi très simple : laissez-faire, ou encore : live and let live, ou même let life live[68]. L’infâme complot libéral — interdire l’agression et laisser tout le monde tranquille pour tout le reste :
Le libéralisme peut d’ailleurs se justifier de différentes manières : ce respect du Droit, est, par exemple, pour beaucoup de libéraux, cohérent avec le Christianisme [69]. D’autres constatent qu’une société qui respecte le Droit libéral est celle qui sera la plus prospère, dont les habitants auront le niveau de vie le plus élevé, l’espérance de vie la plus longue, le taux de mortalité infantile le plus faible[70], etc — et que c’est une raison largement suffisante pour l’adopter. D’autres estiment que le Droit libéral est un impératif logique inévitable [71] ou encore tout simplement la seule alternative au nihilisme, le seul Droit cohérent et universalisable [72], une simple application de la logique et du principe de l’estoppel :
- In other words, you can’t treat others like savages, i.e. violate their property rights, and then expect to have your own dignity respected in return. This is different than saying you shouldn’t treat others like savages, or you ought not violate other’s property. It’s more like saying, you shouldn’t treat others like savages, provided that you do not want to be treated like a savage yourself.
Ainsi, tout un chacun peut trouver son intérêt dans le libéralisme, ou l’accepte déjà implicitement, même sans en comprendre tous les aspects. Et tout un chacun peut pratiquer le libéralisme (respecter le Droit), sans être un philosophe professionnel ni même en comprendre les raisons profondes. Cette diversité, cette harmonie, cette tolérance exaspèrent les prétendus « objectivistes » ? Tant pis pour eux — le monde progresse et continue de progresser vers davantage de respect du Droit libéral, avec eux, sans eux ou même contre eux.