Contre le centralisme
par Hans-Hermann Hoppe, 1993, traduction François Guillaumat [1] [2]
S’ils expriment des aspirations populaires authentiques, il faut encourager la sécession et ceux qui s’opposent au regroupement des Etats, car intégrer les peuples dans des ensembles politiques plus vastes est contraire à leurs intérêts.
Le texte allemand, publié sous le titre : « Wirtschaftliche Kooperation statt politische Zentralisation » [« Coopération économique plutôt que centralisation politique »] dans la Schweitzer Monatshefte de mai 1993, pp. 365-371, a inspiré les intertitres et permis de modifier quelques passages traduits de la version anglaise, « Against Centralization », parue dans The Salisbury Review de juin 1993, aux pp. 26-28. [F. G.].
Contre le centralisme — Coopération économique oui, intégration politique non.
L’effondrement du communisme dans toute l’Europe de l’Est a provoqué un mouvement sécessionniste sans précédent. L’Union Soviétique a cessé d’exister. A la place, il y a plus d’une douzaine d’Etats plus ou moins indépendants sur son territoire, et parmi ses plus de cent groupes ethniques, religieux ou linguistiques, plus d’un souhaiterait accéder à l’indépendance. La Yougoslavie s’est cassée en diverses composantes nationales. La Slovénie, la Croatie, la Bosnie sont maintenant des Etats. Les Tchèques et les Slovaques se sont séparés pour former des pays indépendants. En outre, il existe en Pologne des Allemands, en Slovaquie des Hongrois, en Serbie des Hongrois, Croates, Macédoniens et Albanais, en Roumanie des Allemands et des Hongrois, et en Bulgarie des Turcs et des Macédoniens, qui désirent l’indépendance. Les événements de l’Europe de l’Est ont aussi donné une force nouvelle aux mouvements sécessionnistes en Europe occidentale : Ecossais et Irlandais au Royaume-Uni, Basques et Catalans en Espagne, Flamands en Belgique, Tyroliens du Sud et Ligue du Nord en Italie.
D’un point de vue global, en revanche, l’humanité s’est plus rapprochée que jamais de la situation d’un GOUVERNEMENT MONDIAL. Même avant la dissolution de l’Union Soviétique, les Etats-Unis avaient acquis un statut hégémonique sur l’Europe occidentale (plus particulièrement sur l’Allemagne de l’Ouest) et sur les pays de la bordure du Pacifique (plus particulièrement le Japon) — comme l’indiquent la présence de troupes et de bases militaires US, les pactes de l’OTAN et de l’OTASE, le rôle du dollar US comme monnaie ultime de réserve internationale, et de la Banque de réserve fédérale comme « prêteur » ou « fournisseur de liquidités » de dernier ressort pour le système bancaire occidental tout entier, de même que des institutions telles que le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque mondiale. En outre, sous l’hégémonie des Etats-Unis, l’intégration politique de l’Europe a constamment progressé. Avec l’institution d’une Banque centrale européenne et d’une monnaie unique, l’unification européenne sera achevée vers le tournant du siècle. Après la disparition de l’Empire soviétique et de sa menace militaire, les Etats-Unis sont apparus comme la seule — et incontestée — superpuissance militaire du monde.
L’examen de l’Histoire conduit encore à une autre observation. Au début de ce millénaire, l’Europe était faite de milliers d’entités territoriales indépendantes. Aujourd’hui, il n’en demeure plus qu’une ou deux douzaines. Il y a certes eu aussi des tendances à la décentralisation. Il y a eu la désintégration progressive de l’Empire ottoman entre le XVIème siècle et la première guerre mondiale, avec l’institution de la Turquie moderne. L’Empire des Habsbourg a été progressivement démantelé après sa plus grande expansion à l’époque de Charles Quint, jusqu’à ce qu’il disparaisse en 1918 et que l’Autriche moderne soit fondée. Cependant, la tendance prépondérante allait dans le sens opposé. Par exemple, pendant la seconde moitié du XVIIe siècle, l’Allemagne était faite de quelque 234 comtés, 51 villes libres et 1 500 manoirs de chevaliers indépendants. Vers le début du XIXème siècle, le nombre était tombé à moins de 50, et en 1871 l’unification était achevée. Le scénario a été le même en Italie. Même les petits Etats ont une histoire d’expansion et de centralisation. La Suisse a commencé en 1291 comme une confédération de trois cantons-Etats indépendants. Dès 1848, elle formait un seul Etat — fédéral — avec quelque deux douzaines de cantons subordonnés.
La petite taille garante d’une imposition modérée
Comment faut-il interpréter ces phénomènes ? A en croire la version officielle, la centralisation serait « bonne », « progressiste », alors que la désintégration et la sécession, quoique parfois inéluctables, représenteraient un anachronisme. On tient pour assuré qu’une taille croissante des entités politiques, pour terminer avec un gouvernement unique dans le monde, garantiraient un élargissement des marchés et par conséquent une prospérité accrue. Et on en donne pour preuve que la prospérité économique s’est spectaculairement accrue avec la centralisation.
Or, cette conception « orthodoxe » de l’Histoire, bien loin d’exprimer la vérité, montre surtout comment celle-ci est écrite par ses vainqueurs. Une corrélation ou une coïncidence dans le temps, ne sont pas la preuve d’une relation de cause à effet*. En réalité, la relation entre prospérité économique et centralisation est très différente — en fait c’est quasiment le contraire — de ce que prétend l’orthodoxie. L’intégration politique (la centralisation) et l’intégration économique (le développement des marchés) sont deux phénomènes totalement différents. L’intégration politique passe par l’expansion territoriale du pouvoir de taxer et de réglementer (d’exproprier) d’un Etat.
L’intégration économique est un approfondissement de la spécialisation interpersonnelle et interrégionale des compétences** et de leur participation aux échanges.
En principe, dans la mesure où ils taxent et réglementent (= exproprient) les propriétaires de capital privé et de revenus gagnés à l’échange, tous les Etats détruisent la production. Ils réduisent la participation aux échanges, ainsi que la création des richesses. Une fois supposée l’existence d’un Etat, cependant, il n’existe aucun lien direct entre la taille de cet Etat et l’intégration économique. La Suisse et l’Albanie sont toutes deux de petits pays, mais la Suisse affiche un degré élevé d’intégration économique, alors que l’Albanie non. Aussi bien l’Union Soviétique que les Etats-Unis étaient vastes ; cependant, alors qu’aux Etats-Unis une forte participation aux échanges permettait un grand enrichissement des compétences, en Union soviétique, pratiquement sans propriété privée du capital, il n’y avait pratiquement aucune intégration économique. La centralisation, par conséquent, peut aussi bien aller de pair avec la régression qu’avec le progrès.
Il n’en existe pas moins un important lien indirect entre la taille du pays et l’intégration économique. Il est impossible qu’un gouvernement central dominant de vastes territoires — et encore moins un gouvernement mondial — apparaisse comme cela, ab ovo. Bien au contraire, toutes les institutions qui ont le pouvoir d’imposer taxes et réglementations aux propriétaires légitimes ont dû commencer petites. Et la petite taille pousse à la modération. Un petit Etat a beaucoup de concurrents proches, et s’il impose et réglemente ses propres sujets de manière plus voyante que lesdits concurrents, il pâtira certainement de l’émigration, et d’une baisse correspondante de ses recettes fiscales. Imaginez par exemple qu’un simple ménage, ou un village, soit territoire indépendant. Un père pourrait-il faire à son fils, ou un Maire à son village, ce que le gouvernement de l’Union Soviétique a fait à ses sujets (c’est-à-dire leur dénier tout droit de propriété sur le capital), ou ce que les Etats dans toute l’Europe occidentale et les Etats-Unis font à leurs citoyens (c’est-à-dire leur confisquer jusqu’à la moitié de ce qu’ils ont produit) ? Evidemment non. Ou bien il y aurait une révolte immédiate et le gouvernement serait renversé, ou alors tout le monde s’en irait dans le village d’à côté.
Contrairement à la version officielle, par conséquent, c’est le fait que l’Europe possédait au départ une organisation politique très décentralisée, avec d’innombrables entités politiques indépendantes, qui explique l’origine du capitalisme : le développement de la participation aux échanges et de la production de richesses — dans le monde occidental. Ce n’est pas par hasard si le capitalisme a d’abord fleuri dans des conditions d’extrême décentralisation politique : dans les Cités-Etats de l’Italie du Nord, en Allemagne du Sud, et dans les Pays-Bas sécessionnistes.
La concurrence pour l’implantation des activités
La concurrence entre petits Etats pour des sujets imposables les met en conflit les uns avec les autres. A la suite de ces conflits inter- Etats, évoluant historiquement au cours des siècles, un petit nombre d’Etats réussissent à étendre leurs territoires, alors que davantage d’autres sont éliminés ou fusionnent. Quels sont les Etats qui l’emportent dans ce processus de concurrence éliminatrice et quels sont ceux qui perdent, cela dépend de nombreux facteurs. Mais dans le long terme, le facteur décisif qui détermine le résultat est la quantité relative de ressources économiques à la disposition des hommes de l’Etat. En taxant et réglementant, bien entendu, les Etats ne contribuent en rien à la création des richesses. Bien au contraire, ils tirent sur la richesse existante de manière parasitaire. Cependant, ils peuvent toujours affecter défavorablement la quantité de richesses existantes. Toutes choses égales par ailleurs, moins lourde est la charge des impôts et réglementations imposées par un gouvernement à son économie, et plus sa population tend à croître (pour des raisons internes aussi bien que par l’immigration) et plus grand est le montant de richesses produites sur place sur lesquelles il peut tirer en cas de conflit avec ses concurrents. C’est pour cette raison que la centralisation est souvent facteur de progrès. Les Etats qui taxent et réglementent peu leurs économies — les Etats libéraux — ont tendance à battre les Etats non libéraux, et à étendre leur économie à leurs dépens. C’est cela qui explique l’apparition de la « Révolution industrielle » dans les pays centralisés d’Angleterre et de France. Cela explique pourquoi, au cours du XIXe siècle, l’Europe occidentale en est venue à dominer le reste du monde (et non le contraire), et pourquoi ce colonialisme a généralement été facteur de progrès. En outre, il explique la montée des Etats-Unis au rang de superpuissance au cours du XXe siècle.
Cependant, plus le processus se développe de gouvernements plus libéraux en soumettant d’autres qui le sont moins, et plus les territoires sont vastes, moins il y a de concurrents et plus ils sont éloignés, et plus il en coûte de passer d’un pays à l’autre. De sorte que s’affaiblissent les contraintes qui poussaient un gouvernement à être libéral. A mesure que l’on approche de la limite d’un seul gouvernement mondial, toutes les possibilités de voter avec ses pieds contre un Etat donné disparaissent. Où que l’on aille, c’est le même système d’impôts et de réglementations qui s’applique*. Une fois l’Etat débarrassé du problème de l’émigration, une contrainte majeure sur l’extension de son pouvoir est levée. C’est ce qui explique l’évolution du XXème siècle. Avec la première guerre mondiale, et plus encore après la seconde, les Etats-Unis sont parvenus à l’hégémonie sur l’Europe occidentale, en héritant ses vastes empires coloniaux. C’est ainsi qu’a été franchi un pas décisif en direction du gouvernement mondial. Une Pax Americana a été instituée. Et en fait, au cours de la période entière, l’Amérique du Nord, l’Europe occidentale et la plus grande partie du reste du monde ont pâti d’une croissance spectaculaire et constante du pouvoir étatique, d’impôts et d’expropriations réglementaires.
Contrat contre domination
A quoi sert donc la sécession ?
Au départ, la sécession n’est rien d’autre qu’un transfert du pouvoir sur la richesse nationalisée d’un plus grand Etat vers un Etat régional plus petit. Si cela doit ou non conduire à plus ou moins d’intégration économique et de prospérité, cela dépendra des politiques suivies par le nouveau gouvernement régional. Cependant, le seul fait de la sécession a un impact favorable immédiat sur la production, car l’une des raisons les plus importantes pour la sécession est typiquement la conviction, de la part des sécessionnistes, qu’eux-mêmes et leur territoire sont exploités par les autres. Les Slovènes* pensaient, avec juste raison, qu’ils étaient systématiquement pillés par les Serbes et par le gouvernement yougoslave dominé par eux ; et les Baltes supportaient mal de devoir payer un tribut aux Russes et à l’Etat soviétique dominé par ceux-ci. Par la vertu de la sécession, les relations de domination interne sont remplacées par des relations internationales de type contractuel, c’est-à-dire mutuellement avantageuses. La séparation volontaire remplace la cohabitation forcée. L’intégration forcée, illustrée par des mesures telles que la cohabitation raciale obligatoire dans les écoles, le contrôle des loyers, les lois « contre la discrimination »** et, comme je vais l’expliquer, la « libre immigration », créent inévitablement tensions, haine et conflits. A l’inverse, la séparation volontaire conduit à l’harmonie sociale et à la paix. Sous le régime de l’intégration forcée, toute faute peut être attribuée à quelque groupe ou culture et tout succès à soi-même. Dans un régime de séparation et d’indépendance, on doit se résoudre à ouvrir les yeux non seulement sur le fait de la diversité des cultures, mais aussi sur celui de niveaux visiblement inégaux de développement culturel. Si un peuple sécessionniste désire améliorer ou maintenir sa position relative vis-à-vis d’un concurrent, rien ne pourra y faire qu’un apprentissage soigneusement discriminant. Il faut imiter, assimiler, et si possible améliorer le savoir-faire, le tour de main, la pratique et les règles des cultures plus avancées, et se garder de ceux des cultures moins avancées. Au lieu de promouvoir un nivellement des cultures par le bas comme le fait l’intégration forcée, la sécession stimule un processus coopératif de sélection et de progrès culturel.
En outre, même si tout le reste dépend des politiques intérieures du nouvel Etat régional et s’il n’existe aucune relation directe entre la taille de l’entité politique et l’intégration aux échanges du monde, il existe cependant un lien indirect important: de même que l’intégration politique finit par promouvoir la désintégration économique, la sécession a tendance à favoriser l’intégration économique et le développement. Tout d’abord, la sécession implique toujours la rupture d’une population plus petite d’avec une population plus grande, et constitue par conséquent un vote contre le principe de la démocratie et de la propriété majoritaire, et pour la propriété privée, décentralisée. Plus important encore, la sécession accroît toujours les possibilités de migrations interrégionales, et un gouvernement sécessionniste est toujours confronté au spectre du vote avec ses pieds. Pour éviter de perdre ses sujets les plus productifs, il est soumis à une pression constante pour adopter des politiques internes relativement plus libérales, autorisant davantage de propriété privée et imposant un moindre fardeau fiscal et réglementaire que ses voisins. Finalement, s’il y avait autant de territoires indépendants que de familles, villages ou villes, les possibilités de sortie du territoire pour raisons économiques seraient maximales, et le pouvoir du gouvernement sur l’économie intérieure le plus petit possible.
En particulier, plus le pays est petit, et plus fortes seront les pressions pour adopter la liberté des échanges à la place du protectionnisme. Toute ingérence des hommes de l’Etat dans les échanges avec les non-résidents limite par la force le domaine des échanges mutuellement avantageux entre territoires et conduit par conséquent à un appauvrissement relatif, aussi bien national qu’à l’étranger. Mais plus le territoire et ses marchés intérieurs sont petits, et plus spectaculaire sera cet effet. Un pays de la taille de la Russie, par exemple, pourrait atteindre des niveaux de vie relativement élevés même si elle renonçait à tout commerce extérieur, pourvu qu’elle se dote d’un marché interne parfaitement libre pour les capitaux et les produits de consommation. En revanche, si la Tchétchénie sécessionniste venait à pratiquer le même protectionnisme, ce serait un désastre*. Imaginons un domaine familial comme la plus petite entité sécessionniste concevable. En se livrant au libre échange le plus total, même le plus petit territoire peut être totalement intégré aux échanges du monde et profiter de tous les avantages de la spécialisation des compétences. Ses propriétaires pourraient devenir les gens les plus riches du monde. L’existence d’un seul riche, où que ce soit, en est d’ailleurs la preuve vivante. En revanche, si la même famille décidait de renoncer à tout échange entre territoires, il en résulterait une abjecte pauvreté, voire la mort. En conséquence, plus un territoire et ses marchés intérieurs sont petits, et plus il y a de chances pour qu’il adopte la liberté des échanges.
Le sécessionnisme, force de progrès
Le sécessionnisme, et le développement des mouvements séparatistes et régionalistes en Europe de l’Est et occidentale ne représentent absolument pas un anachronisme, mais doivent être considérés comme les forces potentiellement les plus progressistes du point de vue historique, particulièrement quand on pense qu’avec la chute de l’Union soviétique, nous sommes plus proches que jamais d’un « nouvel ordre mondial ». La sécession accroît la diversité ethnique, linguistique, religieuse et culturelle, alors qu’au cours de siècles de centralisation, des centaines de cultures différentes ont été étouffées. Elle mettra fin à l’intégration forcée amenée par la centralisation, et au lieu de susciter les antagonismes sociaux et le nivellement des cultures, elle favorisera la concurrence pacifique, coopérative, de cultures différentes, sur des territoires séparés. En particulier, elle élimine le problème de l’immigration, qui empoisonne de plus en plus les pays de l’Europe de l’Ouest de même que les Etats-Unis. Aujourd’hui, chaque fois que le gouvernement central permet l’immigration, il autorise des étrangers à se rendre — littéralement sur les routes possédées par l’Etat — jusqu’au pas de la porte de n’importe lequel de ses résidents, sans se soucier en rien de savoir si ces résidents-là désirent un tel voisinage avec des étrangers. La « liberté d’immigrer » est donc, dans une large mesure, une intégration forcée. La sécession résout ce problème en permettant à des territoires plus petits d’avoir chacun ses propres critères d’admission, et de déterminer indépendamment avec qui ils désirent s’associer sur leur propre territoire et avec qui ils préfèrent coopérer à distance. Enfin, la sécession favorise l’intégration et le développement économiques. Le processus de centralisation a conduit à la formation d’un cartel d’Etats dominé par les Etats-Unis, qui prétend gérer l’immigration, le commerce international et la monnaie fiduciaire ; à des Etats de plus en plus inquisiteurs, de plus en plus lourds à supporter, une tendance à l’ingérence humanitaire et militaire au niveau mondial, à la stagnation voire au déclin des niveaux de vie. La sécession, si elle s’étend suffisamment, pourrait changer tout cela. Une Europe consistant en des centaines de pays, cantons et régions distincts, des milliers de villes libres indépendantes comme les « bizarreries » contemporaines de Monaco, de San Marin et d’Andorre, avec un développement extraordinaire des possibilités de voter avec ses pieds contre une mauvaise politique économique, ce serait une Europe de petits gouvernements libéraux économiquement intégrés par la liberté des échanges et une monnaie-marchandise internationale telle que l’or. Ce serait l’Europe d’une croissance économique sans précédent et d’une prospérité inouïe.
- Cf. du même auteur, Kritik der kausalwissenschaftlichen Sozialforschung. Untersuchungen zur Grundlegung von Soziologie und Ökonomie (Opladen : Westdeutscher Verlag, 1983). Cf. aussi Ludwig von MISES : Human Action: A Treatise on Economics (Chicago : Regnery, 1966) [L’Action humaine (Paris, PUF, 1985)] [F. G.].
- * HAYEK souligne que la spécialisation dite « internationale » est en fait inter- personnelle, et que les « facteurs de production » sont essentiellement des compétences que l’intensification des échanges permet d’approfondir. Il faudrait donc toujours parler d’« approfondissement des compétences » chaque fois qu’il est question du rôle de la « division du travail » dans l’enrichissement de la société [F. G.]
- Comme la substitution d’une « monnaie unique » aux diverses monnaies nationales, la prétendue « harmonisation » fiscale et réglementaire de l’Europe vise à détruire les contraintes que la concurrence entre Etats impose aujourd’hui au pouvoir de piller des hommes de l’Etat [F. G.].
- ... et les Croates. Les Slovènes étaient en fait relativement ménagés parce qu’ils étaient moins nombreux que les Croates mais que la clique exploiteuse de Belgrade ne pouvait pas se permettre de les laisser s’unir avec eux : leur coalition aurait été la plus peuplée et de beaucoup la plus développée [F. G.].
- * Privée, bien sûr : sous prétexte d’interdire la « discrimination » par des personnes privées, les hommes de l’Etat peuvent en principe détruire toute liberté de choix de leurs sujets. Car le terme de « discrimination » ne désigne rien d’autre qu’un choix que l’on désapprouve ; toute action discrimine, parce que tout choix « préfère et écarte » (von MISES). Ces interdictions législatives de « discriminer » imposées aux personnes privées leur sont une application illégitime, à des fins d’oppression, du prétendu « droit public ». Ayn RAND écrivait :
"L’astuce consiste à accuser les citoyens privés de violations particulières du droit qui sont interdites aux hommes de l’Etat justement parce que lesdits citoyens privés n’ont pas le pouvoir de les commettre. Cela permet de délier les hommes de l’Etat de toute entrave à leurs interventions. Ce tour de passe- passe devient de plus en plus évident dans le domaine de la liberté d’expression."
(« Man’s Rights », The Objectivist Newsletter avril 1963. Réédité dans The Virtue of Selfishness, New American Library, New York, 1964 [La Vertu d’égoïsme, Paris, Les Belles Lettres, 1992). Le pseudo-principe « public » de « non-discrimination » ou « d’égalité de traitement » résulte lui-même de la dénaturation d’une authentique règle du raisonnement juridique : celle de la cohérence logique des principes du droit. Or, un droit soumis à la logique, c’est un droit qui proscrit toute appropriation violente : c’est la condamnation radicale du prétendu « droit » public, dont l’alpha et l’oméga est de voler les uns pour favoriser les autres. L’hypocrisie est donc double : lorsque les hommes de l’Etat prétendent soumettre des personnes privées à une règle de « droit public », comme s’il s’agissait déjà de fonctionnaires (signe que la société est déjà semi-totalitaire) ; mais aussi lorsque les hommes de l’Etat prétendent eux-mêmes « ne pas discriminer », alors qu’ils sont là uniquement pour ça. Cette double imposture trouve son homologue dans la politique économique et sociale, où les hommes de l’Etat utilisent sans cesse comme prétextes pour violer le droit des personnes des désordres sociaux durables (crises, chômage, pauvreté) que leur intervention a elle-même causés (cf. sur ce point : Michel de PONCINS, Chômage, fils du socialisme, Paris, OEIL, 1992) [F. G.].
- L’auteur parlait originellement des régions sécessionnistes à majorité serbe en Croatie. Cette majorité est partie, sa sécession ayant été vaincue ; il fallait donc trouver un exemple qui ne soit pas périmé.
Il suffit par ailleurs d’empêcher les échanges pour provoquer la même catastrophe. Ceux qui croient aux « bienfaits » du protectionnisme devraient aller voir ce que donne le blocus de l’Irak pour constater ses véritables effets [F. G.].