Le financement public, piège pour les professions libérales

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Par François Guillaumat

Ou: Comment les médecins ont échangé leur droit d’aînesse contre un plat de lentilles.

Médecins pharmaciens et autres professions de santé peuvent aujourd’hui se demander comment le financement public des dépenses médicales, système qui semblait si bien marcher jusqu'à présent, échoue à préserver leur revenu et se met à leur opposer des exigences de plus en plus contraignantes.

Le fait est que, nonobstant les croyances des hommes de l’Etat adeptes de la religion démocrate-sociale, la sécurité sociale n'est pas un ordre stable mais un désordre à la dérive. Déréglée dès le départ, elle devait forcément conduire a l'excès de dépenses et aux velléités de rationnement actuels. Si on ne se décide pas à la doter de la régulation interne qu'elle n'a jamais eue, elle réduira tous les professionnels de la santé au statut sous-humain de fonctionnaires payés avec un lance-pierres.

Un paradis construit sur le vol

Ou: " Tout va tellement mieux quand on oublie que rien n'est gratuit ".

L'Etat Père-Noël (Ludwig von Mises) : le métier des hommes de l'État est de distribuer l'argent de la manière la plus voyante et, comme ils ne distribuent rien de ce qui leur appartient, de le voler de la manière la plus discrète possible.

- Chacun est confronté à des contraintes, souvent insupportables, surtout dans les domaines de la maladie et de la mort. L'Etat promet de desserrer cette contrainte, lui qui peut prendre sans risque aux autres. Chacun croit, que c'est son rêve particulier que les hommes de l'Etat vont exaucer (Hayek : La route de la servitude).

- Au départ, les "besoins" sont toujours bien limités et les décisions sont toujours raisonnables. C'est que les normes en la matière sont dictées par la prise en compte scrupuleuse par les acteurs de l'universelle contrainte de rareté avant introduction de la contrainte étatique.

- L'institution de la pseudo-gratuité (et la croyance en la pseudo-gratuité) reposent sur un gisement inexploité d'illusion fiscale : on sous-estime ce que volent les hommes de l'Etat. Les grands procédés de l'illusion fiscale sont  : la violence différée, l'illusion du choix, le triple piège de l'engagement, de la cohérence et de la réciprocité, l’amalgame entre le pillage redistributif et la vraie production, la censure implicite du monopole, la violence indirecte, le leurre de la loi, le bouc émissaire, la violence masquée, les plumes du paon, la dispersion des charges et la concentration des bénéfices, la persécution ostensible et corruptrice, la violence impunie, le besoin factice, la fausse rareté.

- A l'abri de cette illusion fiscale, la médecine subventionnée prospère : "on" (c‘est à dire les hommes de l'Etat) a " solvabilisé " la demande. Les gens sont mieux soignés, le médecin change de voiture, s'achète une maison. Le rêve. Pourquoi ce rêve tourne t-il au cauchemar?

Qui paie, commande

Ou : "Le Père Noël est une ordure".

Les Américains disent "you can't cheat an honest man" (on n'escroque pas un honnête homme). Lorsqu'on veut faire une dupe, il faut l'attirer avec un gain dont il sait bien au fond qu'il est anormal. Cette fameuse " gratuité " n'est évidemment qu'une pseudo-gratuité, et elle va se payer d'une manière ou d'une autre. Plus spécifiquement, l'aubaine que constitue le butin sera dispersée d’une manière ou d'une autre, dont la plus immédiatement imaginable (et la raison d'être de toute la manipulation) est un monstrueux transfert de pouvoir à la caste parasitaire des hommes de l'Etat.

La nature des actes qui constituent la subvention réalise d’emblée la confiscation du pouvoir. Les hommes de l'Etat volent des producteurs (essentiellement les salariés, par le biais des "cotisations" de " Sécurité Sociale ") et distribuent le butin à d'autres producteurs (essentiellement les médecins, mais aussi les infirmières et laboratoires). Ils confisquent donc nécessairement à leur profit le pouvoir de décision et cela même si, au départ, ils doivent l’exercer de façon modérée. Ce n'est plus qu'une question de temps, car les prétextes ne leur manqueront pas pour l'exercer ensuite de plus en plus violemment, par l'accaparement des ressources et le vissage autoritaire.

L’accaparement des ressources

Les hommes de l'Etat commencent, disent-ils, par voler pour vous (ce n'est pas vrai si vous êtes salarié, vous aurez eu des raisons de le croire, si vous êtes médecin). Seulement voilà : c'est lassant de voler pour les autres (et d'ailleurs, quand on passe tout son temps à le faire, il faut bien commencer à voler un peu pour soi-même. Sinon, de quoi vivrait-on?). Les hommes de l'Etat étant ce qu'ils sont, quiconque peut envisager d'exercer une parcelle d'influence essaiera, à son petit niveau, de récupérer pour son propre compte, la ressource prétendument "gratuite"

D'où les traits caractéristiques du monopole "public":

- Hauts fonctionnaires et élus deviennent les vrais clients. D'où service inadéquat et mépris croissant du client (réduit au statut sous-humain " d’usager "), dépenses de prestige (haute technologie, laboratoires de recherche, matériel inutilement coûteux).

– Pour pallier le fait que l'argent est volé, et les décisions politico-administratives arbitraires, les hommes de l'Etat soumettent l'organisation à des règles bureaucratiques destinées à empêcher (partiellement) gaspillage et corruption et (faussement) censées servir d’Erzatz à l'obligation concrète de servir le public qu'imposerait le paiement direct. Ces règles entravent la recherche de modes d'organisation plus efficaces et découragent la prise de risques.

- Pour administrer ces règles bureaucratiques, il faut des bureaucrates : un fonctionnaire ... pour ...un vrai producteur (comme on dit qu'il y a en France un rat par habitant).

- Enfin, corruption et vols se développent à tous les niveaux.

En outre, le système est déréglé à tous les niveaux (on pourrait ainsi dire "dérégulé", car malgré les fausses traductions de l'anglais, c'est la réglementation qui dérègle, et la déréglementation qui permet à nouveau la régulation sociale par le Droit spontané, celui des contrats).


J'm’en fous, c'est pas mon fric

Le financement par le vol déresponsabilise forcément :

celui qui paie, parce qu'il a perdu le pouvoir de refuser son argent;

celui qui ordonne les dépenses, parce que son seul intérêt est de dépenser toujours davantage, et

celui qui vole, parce que son pouvoir dépend de l'ampleur du butin.

L'habitude d'économiser se perd donc partout. Le seul qui aurait intérêt à faire économies, celui qui paie, voit piétiner son Droit de refuser son argent.

Phénomène caractéristique : comme la hausse des prix lors d'une politique d'inflation, la hausse des charges semble monter de partout et ne venir de nulle part, étant le produit du choix " rationnel " (conforme à la " logique " du rat dans un labyrinthe) de chacun. On invoque le "progrès technique", or, celui-ci fait baisser les coûts.

(C'est aussi la raison de la hausse des prix aux Etats-Unis, où déjà 40% de l'argent dépensé pour la médecine est directement volé par Medicare et Medicaid, le reste étant privilégié par l'exemption d’impôt sur le revenu pour les primes d'assurance-maladie).

Ca ne vaut rien, c'est gratuit

En même temps, la valeur du service baisse aux yeux de ceux qui s'en servent.

Certes, les hommes de l'Etat ont bien sûr tout fait pour confisquer la rente à leur profit, mais de toute façon, c'est une loi générale de l'économie que la valeur tend toujours vers le coût. Lorsqu'on reçoit un produit à bas prix, sa valeur perçue (et d'autant plus dans les générations montantes; c'est le syndrome dit de l'enfant gâté, que l'on connaît bien en matière d'immigration) baisse jusqu'à ne plus représenter que le coût subi pour se le procurer. De sorte que:

- la valeur de la subvention disparaît aux yeux de "l'usager". Phénomène bien connu dans l'enseignement, où en outre la scolarité obligatoire confère une valeur négative aux services pour certains, mais qui explique en médecine qu'on finisse par trouver normal de la payer moins cher que les services d'artisans moins longuement formés. Ce qui ouvre le chemin aux rémunérations de plus en plus misérables par quoi les hommes de l'Etat, acheteurs réels et monopolistiques des services, vont exploiter leurs fournisseurs.

- La demande n'est plus contrainte que par les coûts non pécuniaires qui, dans la pseudo-gratuité, sont par hypothèse les seuls perçus : coûts d'information, de transport, perte de temps, etc. Ce qui prépare le chemin à la limitation de la demande par l’accroissement des coûts perçus.

Accroissement d'abord spontané, par l'évolution bureaucratique normale, puis délibéré par la politique de rationnement de la demande par l'offre (et l'organisation délibérée de pénuries).

- Lorsque l'illusion fiscale connaît de vraies pannes (on ne fait pas si facilement le " coup" de la violence indirecte aux entrepreneurs indépendants), comme on ne peut pas obtenir que les hommes de l'Etat cessent de vous voler, le seul moyen de récupérer son bien (tout en se vengeant de l'escroquerie pillarde dont il est victime) c'est de prendre les hommes de l'Etat au mot de leur prétendue "gratuité" et de dépenser systématiquement davantage tout en commençant à travailler au noir (la Sécu, ça craint, en abuser c’est bien).

La faillite, inscrite dans le système dès le début, commence à apparaître nettement dans les comptes. C'est alors que les hommes de l'Etat doivent faire acte de "courage" (= violer leurs engagements), faire preuve de "volonté politique" (= écraser les faibles, ménager les puissants), se montrer "audacieux" (= stupidement autoritaire).


Les hommes de l'Etat jettent le masque

- II n’est bien sûr pas question de remettre en cause le principe du pillage politique (de la " solidarité") : la raison d'être, le goût du pouvoir arbitraire des hommes de l'Etat demeure et en outre, de plus en plus d'usagers, profiteurs et prébendiers dépendent du système et le maintiennent de leur masse stérile, parasitaire et revendicatrice. Les hommes de l'Etat vont donc renier leurs engagements.

- Ils renient leurs engagements financiers ; ils voleront toujours davantage aux contribuables pour leur fournir toujours moins de services. Le "service public " révèle sa vraie nature. C'est verbalement qu'il "sert le public" (la loi, les puissants le disent), mais il en est réellement dispensé (par les mêmes). Alors que le client de l'entreprise normale (privée et concurrentielle) est l'objet de tous ses soucis, "l’usager" du service public n'est qu'un "prétexte à recevoir des privilèges" et l'idéal secret de ses administrateurs est qu'il disparaisse (avantage secondaire du retrait des services : une privatisation partielle de fait).

– Les hommes de l’Etat trahissent leurs engagements de payer correctement leurs fournisseurs. Etant l'acheteur dominant des services, ils se conduisent en monopole d'achat et achètent les services moins cher qu’ils ne vaudraient sur un marché libre. D'où l'amenuisement des rémunérations. Les professions de santé se retrouvent moins bien payées qu'elles ne le seraient sur un marché libre et découvrent qu’en acceptant le financement public (=criminel), elles ont troqué leur droit d'aînesse contre un plat de lentilles.

Pour concrétiser ce pouvoir de monopole, aussi longtemps que demeure le principe de l'exercice "libéral", les hommes de l'Etat devront user de moyens de pression tels que le chantage à la suppression des remboursements, puis des autorisations d'exercer. Ils exploiteront d'abord les plus faibles (infirmières), puis les autres (médecins, chirurgiens) suivront. L'obligation de négocier avec eux développera des "organisations représentatives" dont ils essaieront d'acheter les dirigeants ou de manipuler la "représentativité".

La contrainte autoritaire sur les quantités succède ensuite au contrôle des prix "enveloppes de dépenses", quotas d'actes, en attendant la nationalisation complète des services.

– Les hommes de l'Etat renient leur engagement de respecter la liberté des usagers : refusant de mettre en cause le principe de l'irresponsabilité institutionnelle (le socialisme) qui est la raison d'être du système, on prétendra " responsabiliser " les acteurs en revenant au mode de "régulation" autoritaire de la société archaïque (mais avec une possibilité bien plus réduite de " voter avec ses pieds "). Cette prétendue " responsabilisation " (encore un Ersatz) commence par des discours et des campagnes débiles à la télévision (la Sécu, c'est bien... ). Elle se terminera par le fichage de la population (carte à puces) et l'affectation autoritaire à un médecin ou à un centre de soins (Suède et Grande-Bretagne).

- Les hommes de l'Etat renient leur engagement de développer les services ; déclarant de plus en plus de "besoins" "satisfaits" et de services "abusifs" (et pouvant toujours pointer du doigt une "inégalité" justifiant qu'on refuse ici ce qu'on se déclare prêt à autoriser là -s'il y avait une demande les hommes de l'Etat vont refuser l'ouverture de nouveaux centres, fermer les anciens, supprimer les postes, etc. Dans la pseudo-gratuité, l’offre est le seul régulateur de la demande, ce qui veut dire que les hommes de l'Etat vont s'acharner à réduire l'offre.

Domine alors un discours ahurissant, et qui serait impensable si le service était privé et concurrentiel, suivant lequel l'accroissement des dépenses serait un problème grave (imaginons les dirigeants de la chaussure française s'inquiétant de la progression "alarmante" de leur chiffre d'affaires). Le problème, bien sûr, tient exclusivement au financement criminel, à la séparation forcée de la fourniture du service et de la collecte du paiement.

- Ces mesures échouent à seulement freiner l’accroissement des dépenses aussi longtemps qu'une affectation autoritaire stricte des patients aux médecins n'est pas imposée et en outre,

- Elles multiplient des coûts qui, bien que très réels et de plus en plus douloureusement perçus par ceux qui les subissent, ne prennent pas de forme pécuniaire (mesurable), n’entrent pas dans les statistiques, et permettent donc de faire croire à la réalité des économies: délais d'attente, traitement des usagers comme des porcs, longs déplacements (cas typique de la médecine d'Etat britannique).

- Gestapo de l'URSSAF : Agents assermentés pour " constater les infractions". Maintenant pour les caisses indépendantes.

- Attali-Euthanasie : c'est vers la fin de sa vie que le vieillard, désormais bouche inutile et parasite forcé pour l'Etat, coûte le plus cher, notamment en soins hospitaliers : tout ça pour quelques semaines en plus ! Lorsque le choix de prolonger la vie implique une forte dépense, et que le bureaucrate a confisqué pour lui même le pouvoir d'ordonner ou d'interdire cette dépense, le bureaucrate, qu'il soit " médecin raté " de la " Sécu " ou simple fonctionnaire, a le pouvoir de vie et de mort sur quiconque a le malheur de tomber malade entre ses mains.

On ne peut pas laisser les gens faire n'importe quoi

Le slogan autoritaire et arrogant des hommes de l'Etat pour justifier leur pouvoir est "on ne peut pas laisser les gens faire n'importe quoi" (si on instituait le salaire direct, les gens iraient le boire et deviendraient des miséreux à la charge de "la société"). Or ces nuisibles-là, nous voyons bien que ce sont eux qui font n'importe quoi, et qui obligent les autres à faire n'importe quoi.

Le système est fondé sur l'irresponsabilité institutionnelle de tous, qui engendre l’irrationalité chez tous, et réduit donc tout le monde au statut de sous-hommes. Le socialisme fait des êtres humains des sous-hommes (ratoïdes: cf. Zinoviev, Homo Sovieticus).

Reprenons le slogan à notre compte. Pour empêcher les gens (à commencer par les hommes de l'Etat) de faire n'importe quoi, c'est-à-dire pour revenir à une société normale et réglée, le seul moyen est d'éradiquer le principe de l'irresponsabilité institutionnelle, c'est à dire d'abolir les ingérences autoritaires de l'État dans l'organisation et le financement.