« Objectivisme » : différence entre les versions

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philosophie de Ayn Rand basée sur le rationalisme, l'égoïsme, l'individualisme, le capitalisme et le minarchisme. le principe de base d'où vient le nom est que la réalité est absolue et objective (contraire: relativisme), et que la raison la perçoit telle qu'elle est. Ayn Rand a repris les principes de logique d'Aristote qui sont:
L'"Objectivisme",  le nom que Ayn Rand donnait à sa philosophie, s'oppose par définition au "subjectivisme" en philosophie : il s'agit d'affirmer que ''la preuve purement logique est possible et nécessaire'' dans tous les domaines de la philosophie,  y compris en [[métaphysique]], en [[philosophie morale]] et [[philosophie politique|politique]] et en théorie économique  -- domaines où les philosophes à la mode de l'époque le niaient, soit au nom d'une "connaissance" non fondée sur l'expérience (à la manière de [[Emmanuel Kant|Kant]] et de ses successeurs),  soit au nom d'une prétendue "impossibilité" de connaître (à la suite de [[David Hume|Hume]] et de [[Auguste Comte|Comte]]).


    * non-contradiction: la réalité ne peut être contradictoire, une chose ne peut  pas être et ne pas être en même temps et pour la même relation. une table peut être verte ou rouge à différents moments, mais au même moment, non.
==2 + 2 = 4 est une proposition scientifique==
    * either-or:  une chose est ou n’est pas.
Il s'agissait donc d'ancrer la preuve logique dans l'expérience, par une théorie des concepts, par une ''science des définitions'' qui prouve qu'un énoncé peut bel et bien être "vrai par définition" :
    * A=A:  une chose est ce qu’elle est, une table est une table.
en d'autres termes de prouver, aux yeux des philosophes et à l'encontre la plupart d'entre eux,
que deux et deux font bien toujours quatre et que cette affirmation-là  est bien une proposition scientifique<ref>Cf. [[Leonard Peikoff]], [http://docs.google.com/Doc?id=dc2m8p62_432gvrw98fh "La dichotomie analytique-synthétique"], première parution sous le titre  “The Analytic-Synthetic Dichotomy” dans The Objectivist  de mai-septembre 1967, reproduit dans Ayn Rand & Leonard Peikoff: ''Introduction to Objectivist Epistemology'',  New York,  New American Library,  1979</ref>. La philosophie politique  ne consiste-t-elle pas à ''définir'' l'acte juste, la philosophie morale à ''définir'' l'acte bon<ref>La métaphysique implique aussi de ''définir'' l'Etre nécessaire, mais on ne peut pas dire qu'Ayn Rand l'ait su ; faute d'avoir compris la distinction entre le nécessaire et le contingent, sa métaphysique était finalement demeurée assez proche de celle d'Aristote, qui croyait les astres éternels</ref> ?
C'est ce qu'a toujours pensé la ''tradition philosophique réaliste''  d'[[Aristote]] et saint [[Thomas d'Aquin]], qu'elle entendait en fait renouveler et reformuler, en les débarrassant des influences platoniciennes sur la pensée d'Aristote.
 
==La double dépendance des concepts==
La théorie des concepts de Ayn Rand, qu'elle a développée dans ''Introduction to Objectivist Epistemology''<ref>Dans ''The Objectivist'', juillet 1966 et février 1967.</ref>, consiste à décrire la manière dont la pensée rationnelle ''choisit'' de distinguer dans l'expérience les entités qui existent, puis entreprend de les ''classer'' d'après leurs caractéristiques communes, d'après tout ce qu'on sait à leur sujet et de les ''définir'' à partir de celles de leurs caractéristiques qui sont les plus propres  à les distinguer des autres.
L'exemple de l'histoire naturelle,  qui fonde ses classements  sur les caractéristiques constatables des êtres qu'elle observe, et les remet en cause  à l'occasion de découvertes majeures,  est un assez bon exemple de la manière  dont la pensée construit sa hiérarchie des concepts, à la fois dépendants de toute la science que l'on peut posséder sur les existants  qu'ils désignent, et dépendants des autres concepts dont la validité peut et doit également être constatée.
C'est en procédant par abstractions à partir des abstractions les plus proches de l'expérience concrète, puis en construisant de nouvelles abstractions sur ces abstractions, et ainsi de suite, que la pensée  élabore  ses concepts les plus généraux, qui n'en correspondent pas moins  à une réalité  omniprésente pour n'être pas directement perceptibles.
 
A ce sujet, Ayn Rand se moquait  évidemment des philosophes qui nient la correspondance nécessaire avec le réel des concepts les plus généraux comme l'existence, l'identité  et la causalité, sous prétexte  que leur contrepartie n'est pas directement observable comme le serait une table, ou un lapin :
 
:"S'il était possible à un animal de décrire le contenu de sa conscience, le résultat serait une transcription de la philosophie de [[David Hume|Hume]].
:Ses conclusions seraient celles d'une conscience confinée au niveau de la perception, réagissant passivement à l'expérience des concrets immédiats, sans aucune capacité à former des abstractions, d'intégrer dans des concepts les objets qu'elle a perçus, attendant en vain qu'apparaisse un objet appelé 'causalité' --sauf qu'une telle conscience serait incapable de tirer aucune conclusion d'aucune sorte<ref>Ayn Rand, [http://tfasinternational.org/ila/AynRand-ForTheNewIntellectual.pdf, ''For the New Intellectual'', 1961, p. 24. Traduit dans [http://fr.liberpedia.org/Pseudo-exp%C3%A9rimentalisme ''Liberpédia'' : "Le pseudo-expérimentalisme"]</ref>.
 
De même des concepts abstraits de la philosophie normative : la définition du "bien" se construit par l'élimination des concepts qui se trouvent être contradictoires... 
et ça tombe bien, il n'y en a qu'une du "juste" qui ne le soit pas :  celle qui procède des ''actes respectueux de la propriété d'autrui''.
 
C'est ainsi qu'à l'usage de ses contemporains, abreuvés de propagande sur l'impuissance de la raison, Ayn Rand a réhabilité  celle-ci non seulement en philosophie normative, mais encore  en métaphysique :
elle a montré que des conclusions définies sont possibles en la matière, même si la science des définitions, comme toute science, ne cesse de s'améliorer par l'accroissement des connaissances et l'élimination des incohérences subsistantes.
 
==== Les instruments du ''détective philosophique'' ====
Armée de sa ''Science des Définitions'', Ayn Rand  avait énuméré différents  types d'erreurs  possibles en la matière, qui font des mots des "abstractions flottantes" dont la correspondance  avec le réel ne peut pas être établie, des "anti-concepts" qui détruisent la pensée au lieu de servir celle-ci.
* L'erreur dont l'identification est la plus féconde en la matière  -- parce qu'elle se réfère à l'interdépendance des concepts dans la hiérarchie des classifications de la connaissance -- forme de ''présupposé logique'' nécessairement méconnue par certaines écoles de philosophie, est peut-être le ''vol de concepts'' : l'emploi d'un concept dont on a par ailleurs  nié les fondements épistémologiques, c'est-à-dire le lien nécessaire avec le réel.
Ainsi, souligne [[Nathaniel Branden]],  le concept de "vol"  n'a de sens que s'il peut exister une "propriété  légitime" : la formule de [[Pierre-Joseph Proudhon|Proudhon]] : "la propriété, c'est le vol" implique donc une contradiction, parce qu'elle se sert d'un mot dont en même temps elle nie implicitement la validité<ref>Nathaniel Branden, [http://www.rationalresponders.com/forum/sapient/philosophy_and_psychology_with_chaoslord_and_todangst/6715 "The Fallacy of the Stolen Concept"], ''For the New Intellectual'', 1961, p. 24. Traduit comme [http://fr.liberpedia.org/Vol_de_concept ''Liberpédia'' : "Le vol de concepts"].</ref>.
* D'autres types d'"anti"concepts" identifiés par Ayn Rand sont :
 
-- l'"abandon de contexte" ("concept-dropping"), erreur de catégorie qui consiste à prétendre se servir d'un mot en-dehors des conditions où celui-ci peut servir ;
 
-- l'"amalgame" ("package-dealing") qui consiste  à fourrer dans le même sac des faits  en réalité  foncièrement différents et
 
-- la "définition par des traits secondaires" ("definition by non-essentials"),  qui consiste à définir un concept par une de ses caractéristiques qui ne permet pas vraiment de distinguer ce qu'il désigne des autres existants<ref>Un anti-concept peut implique plusieurs de ces erreurs  à la fois :
ainsi,  dépassant même [[Ludwig von Mises]] sur ce point, Ayn Rand  avait compris  qu'il ne peut pas exister de monopole sur un marché libre, entre autres parce que la fausse notion de "monopole sur un marché libre"  combine :
 
-- l'"amalgame",  en fourrant dans le même sac des situations qui naissent de contrats  librement acceptés  avec des situations qui naissent de la violence réglementaire de l'état ;
 
-- la "définition par des traits secondaires", parce que ce qui, dans le monopole,  "nuit à la production", ce n'est jamais l'"inélasticité de la courbe de demande" mais bien les ''entraves règlementaires'' à la liberté de produire et d'échanger ;
 
-- des "concepts volés",  parce que la prétendue "définition" d'un "monopole sur un marché libre"  dépend d'autres notions qui se dissolvent à l'examen rationnel :
les notions d'"élasticité de la courbe de demande" et de "part de marché" sont en réalité arbitraires (parce qu'elles dépendent d'un ''contexte'' indéfinissable en raison),  
et la notion de "profit de monopole"  est en fait contradictoire (parce qu'il implique une "définition par des traits secondaires" :  le "profit", en fait, ne peut jamais naître que de l'incertitude et par conséquent on ne peut l'associer systématiquement à aucun type de situation économique quelle qu'elle soit).</ref>.
 
Il restera aux  autres philosophes réalistes de décider si ces notions-là peuvent leur être utiles,  ou si les catégories du [[thomisme]] contemporain leur permettaient déjà de s'en passer.
 
==Notes et références==
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Revision as of 1 November 2011 à 22:00

L'"Objectivisme", le nom que Ayn Rand donnait à sa philosophie, s'oppose par définition au "subjectivisme" en philosophie : il s'agit d'affirmer que la preuve purement logique est possible et nécessaire dans tous les domaines de la philosophie, y compris en métaphysique, en philosophie morale et politique et en théorie économique -- domaines où les philosophes à la mode de l'époque le niaient, soit au nom d'une "connaissance" non fondée sur l'expérience (à la manière de Kant et de ses successeurs), soit au nom d'une prétendue "impossibilité" de connaître (à la suite de Hume et de Comte).

2 + 2 = 4 est une proposition scientifique

Il s'agissait donc d'ancrer la preuve logique dans l'expérience, par une théorie des concepts, par une science des définitions qui prouve qu'un énoncé peut bel et bien être "vrai par définition" : en d'autres termes de prouver, aux yeux des philosophes et à l'encontre la plupart d'entre eux, que deux et deux font bien toujours quatre et que cette affirmation-là est bien une proposition scientifique[1]. La philosophie politique ne consiste-t-elle pas à définir l'acte juste, la philosophie morale à définir l'acte bon[2] ? C'est ce qu'a toujours pensé la tradition philosophique réaliste d'Aristote et saint Thomas d'Aquin, qu'elle entendait en fait renouveler et reformuler, en les débarrassant des influences platoniciennes sur la pensée d'Aristote.

La double dépendance des concepts

La théorie des concepts de Ayn Rand, qu'elle a développée dans Introduction to Objectivist Epistemology[3], consiste à décrire la manière dont la pensée rationnelle choisit de distinguer dans l'expérience les entités qui existent, puis entreprend de les classer d'après leurs caractéristiques communes, d'après tout ce qu'on sait à leur sujet et de les définir à partir de celles de leurs caractéristiques qui sont les plus propres à les distinguer des autres. L'exemple de l'histoire naturelle, qui fonde ses classements sur les caractéristiques constatables des êtres qu'elle observe, et les remet en cause à l'occasion de découvertes majeures, est un assez bon exemple de la manière dont la pensée construit sa hiérarchie des concepts, à la fois dépendants de toute la science que l'on peut posséder sur les existants qu'ils désignent, et dépendants des autres concepts dont la validité peut et doit également être constatée.

C'est en procédant par abstractions à partir des abstractions les plus proches de l'expérience concrète, puis en construisant de nouvelles abstractions sur ces abstractions, et ainsi de suite, que la pensée élabore ses concepts les plus généraux, qui n'en correspondent pas moins à une réalité omniprésente pour n'être pas directement perceptibles.

A ce sujet, Ayn Rand se moquait évidemment des philosophes qui nient la correspondance nécessaire avec le réel des concepts les plus généraux comme l'existence, l'identité et la causalité, sous prétexte que leur contrepartie n'est pas directement observable comme le serait une table, ou un lapin :

"S'il était possible à un animal de décrire le contenu de sa conscience, le résultat serait une transcription de la philosophie de Hume.
Ses conclusions seraient celles d'une conscience confinée au niveau de la perception, réagissant passivement à l'expérience des concrets immédiats, sans aucune capacité à former des abstractions, d'intégrer dans des concepts les objets qu'elle a perçus, attendant en vain qu'apparaisse un objet appelé 'causalité' --sauf qu'une telle conscience serait incapable de tirer aucune conclusion d'aucune sorte[4].

De même des concepts abstraits de la philosophie normative : la définition du "bien" se construit par l'élimination des concepts qui se trouvent être contradictoires... et ça tombe bien, il n'y en a qu'une du "juste" qui ne le soit pas : celle qui procède des actes respectueux de la propriété d'autrui.

C'est ainsi qu'à l'usage de ses contemporains, abreuvés de propagande sur l'impuissance de la raison, Ayn Rand a réhabilité celle-ci non seulement en philosophie normative, mais encore en métaphysique : elle a montré que des conclusions définies sont possibles en la matière, même si la science des définitions, comme toute science, ne cesse de s'améliorer par l'accroissement des connaissances et l'élimination des incohérences subsistantes.

Les instruments du détective philosophique

Armée de sa Science des Définitions, Ayn Rand avait énuméré différents types d'erreurs possibles en la matière, qui font des mots des "abstractions flottantes" dont la correspondance avec le réel ne peut pas être établie, des "anti-concepts" qui détruisent la pensée au lieu de servir celle-ci.

  • L'erreur dont l'identification est la plus féconde en la matière -- parce qu'elle se réfère à l'interdépendance des concepts dans la hiérarchie des classifications de la connaissance -- forme de présupposé logique nécessairement méconnue par certaines écoles de philosophie, est peut-être le vol de concepts : l'emploi d'un concept dont on a par ailleurs nié les fondements épistémologiques, c'est-à-dire le lien nécessaire avec le réel.

Ainsi, souligne Nathaniel Branden, le concept de "vol" n'a de sens que s'il peut exister une "propriété légitime" : la formule de Proudhon : "la propriété, c'est le vol" implique donc une contradiction, parce qu'elle se sert d'un mot dont en même temps elle nie implicitement la validité[5].

  • D'autres types d'"anti"concepts" identifiés par Ayn Rand sont :

-- l'"abandon de contexte" ("concept-dropping"), erreur de catégorie qui consiste à prétendre se servir d'un mot en-dehors des conditions où celui-ci peut servir ;

-- l'"amalgame" ("package-dealing") qui consiste à fourrer dans le même sac des faits en réalité foncièrement différents et

-- la "définition par des traits secondaires" ("definition by non-essentials"), qui consiste à définir un concept par une de ses caractéristiques qui ne permet pas vraiment de distinguer ce qu'il désigne des autres existants[6].

Il restera aux autres philosophes réalistes de décider si ces notions-là peuvent leur être utiles, ou si les catégories du thomisme contemporain leur permettaient déjà de s'en passer.

Notes et références

Modèle:Références

  1. Cf. Leonard Peikoff, "La dichotomie analytique-synthétique", première parution sous le titre “The Analytic-Synthetic Dichotomy” dans The Objectivist de mai-septembre 1967, reproduit dans Ayn Rand & Leonard Peikoff: Introduction to Objectivist Epistemology, New York, New American Library, 1979
  2. La métaphysique implique aussi de définir l'Etre nécessaire, mais on ne peut pas dire qu'Ayn Rand l'ait su ; faute d'avoir compris la distinction entre le nécessaire et le contingent, sa métaphysique était finalement demeurée assez proche de celle d'Aristote, qui croyait les astres éternels
  3. Dans The Objectivist, juillet 1966 et février 1967.
  4. Ayn Rand, For the New Intellectual, 1961, p. 24. Traduit dans [http://fr.liberpedia.org/Pseudo-exp%C3%A9rimentalisme Liberpédia : "Le pseudo-expérimentalisme"
  5. Nathaniel Branden, "The Fallacy of the Stolen Concept", For the New Intellectual, 1961, p. 24. Traduit comme Liberpédia : "Le vol de concepts".
  6. Un anti-concept peut implique plusieurs de ces erreurs à la fois : ainsi, dépassant même Ludwig von Mises sur ce point, Ayn Rand avait compris qu'il ne peut pas exister de monopole sur un marché libre, entre autres parce que la fausse notion de "monopole sur un marché libre" combine : -- l'"amalgame", en fourrant dans le même sac des situations qui naissent de contrats librement acceptés avec des situations qui naissent de la violence réglementaire de l'état ; -- la "définition par des traits secondaires", parce que ce qui, dans le monopole, "nuit à la production", ce n'est jamais l'"inélasticité de la courbe de demande" mais bien les entraves règlementaires à la liberté de produire et d'échanger ; -- des "concepts volés", parce que la prétendue "définition" d'un "monopole sur un marché libre" dépend d'autres notions qui se dissolvent à l'examen rationnel : les notions d'"élasticité de la courbe de demande" et de "part de marché" sont en réalité arbitraires (parce qu'elles dépendent d'un contexte indéfinissable en raison), et la notion de "profit de monopole" est en fait contradictoire (parce qu'il implique une "définition par des traits secondaires" : le "profit", en fait, ne peut jamais naître que de l'incertitude et par conséquent on ne peut l'associer systématiquement à aucun type de situation économique quelle qu'elle soit).