« Vol de concept » : différence entre les versions

From Liberpédia
Aucun résumé des modifications
mAucun résumé des modifications
Line 3: Line 3:
La notion de "vol de concepts"  est aussi nécessaire que  difficile  à faire comprendre :  
La notion de "vol de concepts"  est aussi nécessaire que  difficile  à faire comprendre :  


en effet une bonne parie des "philosophes" contemporains,  ou soi-disant tels,  passent leur temps à dire que les définitions seraient "purement arbitraires et conventionnelles" ;  
en effet une bonne partie des "philosophes" contemporains,  ou soi-disant tels,  passent leur temps à dire que les définitions seraient "purement arbitraires et conventionnelles" ;  


et c'est justement cette pratique,  elle-même totalement voleuse de concepts,  qui fait aujourd'hui du critère du "vol de concepts"  un instrument majeur de  la "détection philosophique" au sens de Ayn Rand,  c'est-à-dire de l'identification des énoncés  qui sont par définition philosophiquement faux  parce qu'ils sont en eux-mêmes contradictoires.
et c'est justement cette pratique,  elle-même totalement voleuse de concepts,  qui fait aujourd'hui du critère du "vol de concepts"  un instrument majeur de  la "détection philosophique" au sens de Ayn Rand,  c'est-à-dire de l'identification des énoncés  qui sont par définition philosophiquement faux  parce qu'ils sont en eux-mêmes contradictoires.

Revision as of 14 October 2011 à 16:12

Le "vol de concepts" consiste à se servir dans un raisonnement d'une notion dont par ailleurs on a nié qu'elle corresponde à une réalité existante, contradiction pratique qui réfute évidemment le discours qui en dépendrait.

La notion de "vol de concepts" est aussi nécessaire que difficile à faire comprendre :

en effet une bonne partie des "philosophes" contemporains, ou soi-disant tels, passent leur temps à dire que les définitions seraient "purement arbitraires et conventionnelles" ;

et c'est justement cette pratique, elle-même totalement voleuse de concepts, qui fait aujourd'hui du critère du "vol de concepts" un instrument majeur de la "détection philosophique" au sens de Ayn Rand, c'est-à-dire de l'identification des énoncés qui sont par définition philosophiquement faux parce qu'ils sont en eux-mêmes contradictoires.

En effet, un énoncé qui affirme, ou qui sous-entend, que les définitions seraient "purement arbitraires et conventionnelles" nie toute possibilité de reconnaître comme vraies les démonstrations philosophiques, dont la validité dépend, justement, de la correspondance avec le réel de la définition des mots dont ces démonstrations se servent.

Et comme dans cette mesure il est lui-même de nature philosophique, il se réfute automatiquement ipso facto, ce qui permet de ne plus perdre de temps avec les auteurs qui le prennent au sérieux.

Le "vol de concepts" est certes une notion implicite chez tous les philosophes réalistes -- dans la tradition d'Aristote et de saint Thomas d'Aquin, parce que ceux-ci, à la différence des subjectivistes épistémologiques, connaissent et reconnaissent l'interdépendance et la hiérarchie des concepts, ainsi que leur dépendance vis-à-vis de l'observation du réel.

Cependant, il a fallu attendre la réaction contemporaine des objectivistes au subjectivisme épistémologique dominant pour que, dans le cadre de cette tradition, la notion de vol de concepts apparaisse expressément comme un puissant moyen de réfutation.


Autres exemples de vol de concepts :

- "la propriété, c'est le vol" : le concept de vol présuppose le concept de propriété légitime : on ne peut donc pas définir le "vol" si on ne reconnaît pas qu'une "propriété légitime" peut exister. Or, c'est ce que fait l'énoncé en cause, du moins dans son acception ostensible (certains pourraient le croire de la seule propriété foncière, ce qui est également faux, mais on ne le démontre pas aussi directement).
Cet énoncé est donc contradictoire, et il érige automatiquement son contraire au statut d'axiome : une propriété légitime existe forcément -- ne serait-ce parce que, si elle n'existait pas, on n'aurait le Droit de rien faire et on ne serait plus en vie pour en parler.
- "on ne peut adhérer à la raison que par un acte de foi" est une proposition contradictoire parce que le concept contemporain de "foi" désigne une adhésion de l'esprit indépendante de la raison, distincte de celle-ci voire opposée à elle : il ne peut être défini que si la raison existe indépendamment comme motif d'adhérer à une opinion
-- exemple de la dépendance logique de certains concepts vis-à-vis d'autres, que le subjectivisme épistémologique ne peut que méconnaître par définition.

Le vol de concepts par Nathaniel Branden

"The Stolen Concept", article de The Objectivist Newsletter, novembre 1962, pp. 2 & 4.

Le trait caractéristique de la philosophie au XX° siècle est la résurgence de l'irrationalisme, de la révolte contre la raison.

Les étudiants en philosophie sont assaillis d'affirmations suivant lesquelles aucune certitude ne serait possible quant aux faits de la réalité, le contenu de l'esprit humain n'entretenant aucune relation nécessaire avec eux. D'ailleurs, le concept lui-même de "fait de la réalité" serait une superstition démodée ; la "réalité" ne serait que pure apparence et l'homme ne pourrait, fondamentalement, rien savoir à proprement parler.

Avec la prépondérance de telles idées, le mysticisme primitif connaît son plus beau triomphe et peut bien croire qu'il a - pour l'instant - eu le dernier mot. Car on apprend aux gens à accepter, comme étant la voix de la science, l'idée suivant laquelle la raison humaine serait impuissante à saisir le monde "réel", celui qui est accessible à notre raison ne l'étant pas. Mon propos ici est de m'en tenir à un sophisme unique - une erreur fondamentale de raisonnement - qui pullule dans les écrits des néo-mystiques, et sans lequel aucune de leurs doctrines ne pourrait se propager.

Nous appelons ce sophisme le "vol de concepts".

Pour comprendre en quoi il consiste, prenons-en un exemple dans le domaine politique : le fameux "la propriété, c'est le vol" de Proudhon.

Le "vol" est un concept qui, logiquement et pour sa formation, dépend totalement d'un concept antécédent, qui est la "propriété légitime". Il désigne l'acte consistant à s'emparer de cette propriété légitime contre le consentement de son détenteur. Ainsi, affirmer que "la propriété, c'est le vol" implique une contradiction interne : employer le concept de "vol" en niant la validité du concept de "propriété", c'est se servir du "vol" comme d'un concept auquel, logiquement, on n'a plus droit. En somme, un concept volé.

Toute la connaissance de l'homme, de même que ses concepts, forme une construction hiérarchisée. La fondation, la base ultime de cette connaissance est constituée par les perceptions de nos sens ; elles constituent le point de départ de sa réflexion. A partir de ces perceptions, l'homme constitue ses premiers concepts et définitions (ostensibles ), puis continue à construire l'édifice de sa connaissance en identifiant et en intégrant de nouveaux concepts sur une échelle de plus en plus large. Le processus construit donc ses identifications les unes sur les autres et les unes à partir des autres. Il s'agit de déduire des abstractions plus larges à partir d'abstractions déjà connues, ou de diviser des abstractions plus larges en distinctions plus fines. Les concepts de l'homme sont déduits, ou dépendent, de concepts plus fondamentaux qui sont leurs racines génétiques. Par exemple, le concept de "parent" est présupposé par le concept d'"orphelin" ; si on n'a pas compris le premier, on ne comprendra pas le second, et celui-ci ne saurait avoir de sens.

La nature hiérarchisée du savoir humain implique un important principe qui doit guider le raisonnement de l'homme : quand on se sert de concepts, il faut absolument reconnaître leurs racines génétiques, ce dont ils dépendent logiquement et qu'ils présupposent.

Méconnaître ce principe - comme dans le slogan : "la propriété c'est le vol" - constitue le sophisme du vol de concepts.

Examinons maintenant quelques-uns des dogmes irrationalistes les plus en vue et observons à quel point ils dépendent de cette fraude intellectuelle.

Prenons les lois de la logique. Pour l'école de pensée d'Aristote, on reconnaît ces lois comme une formulation abstraite de vérités évidentes, vérités qui sont implicites dans les premières perceptions humaines de la réalité, implicites dans le concept même d'existence, de l'être en tant qu'être ; ces lois reconnaissent le fait qu'être, c'est toujours être quelque chose, qu'une chose est elle-même. Pour nombre de philosophes contemporains, c'est la mode que de contester cela - et d'affirmer que les axiomes de la logique seraient "arbitraires" ou "hypothétiques". Déclarer que les axiomes de la logique seraient "arbitraires" implique de mépriser le cadre d'où un concept tel qu'"arbitraire" a pu sortir.

Une idée arbitraire est une idée acceptée par hasard, par caprice, au passage ; elle s'oppose à une idée acceptée pour des raisons logiques, en vue précisément de l'en distinguer.

L'existence d'un concept tel qu'une idée "arbitraire" n'est rendue possible que par l'existence d'idées logiquement nécessaires ; la première ne saurait être tenue pour une primaire, étant génétiquement dépendante des secondes. Tenir la logique pour "arbitraire", c'est dépouiller le concept d'"arbitraire" de tout sens.

Déclarer que les axiomes de la logique seraient "hypothétiques" (ou seulement "probables") est se rendre coupable de la même contradiction. Le concept de l'"hypothétique" (ou du "probable") n'est pas non plus primaire ; il n'acquiert un sens que par opposition au connu, au certain, au logiquement prouvé. Ce n'est que lorsqu'on connaît quelque chose de certain qu'on peut arriver à l'idée de ce qui ne l'est pas. Et il n'y a que la logique qui puisse départager les deux.

"Un axiome est un énoncé qui identifie le fondement de la connaissance et de tout énoncé ultérieur relatif à cette connaissance ; un énoncé nécessairement impliqué par tous les autres, qu'un locuteur particulier choisisse de l'identifier ou non. Un axiome est une proposition qui met ses adversaires en déroute par le fait même qu'ils sont obligés de l'accepter et de s'en servir au cours de toute tentative pour la réfuter. Que l'homme des cavernes qui ne choisit pas d'accepter l'axiome de l'identité essaie de présenter sa théorie sans se servir du concept d'identité ni d'aucun concept qui en serait déduit... " (Atlas Shrugged).

Lorsque des "néo-mystiques" mettent en cause le concept d'"entité" et annoncent que, la "naïve" raison nonobstant, tout ce qui existe ne serait que mouvement et changement - ("il n'y a pas d'impossibilité logique à ce que le fait de marcher se produise comme phénomène isolé, sans qu'il fasse partie d'une de ces séries que nous appelons 'personne'", écrit Bertrand Russell) - ils évacuent le fait que seule l'existence d'entités rend possibles les concepts de "mouvement" ou de "changement" ; que le "changement", le "mouvement" présupposent des entités qui changent et se meuvent ; et que celui qui prétend se dispenser du concept d'"entité" perd son droit logique aux concepts de "changement" et de "mouvement" ; ayant coupé leur racine génétique, il n'a plus aucun moyen de leur donner un sens intelligible.

Lorsque des néo-mystiques affirment que ce que l'homme perçoit n'est pas la réalité objective mais une simple apparence, ils esquivent la question de savoir comment on fait pour obtenir un concept comme l'"illusion" ou l'"apparence" sans qu'il existe quelque chose qui ne soit pas une illusion ou pure apparence. S'il n'y avait aucune perception objective de la réalité, dont on puisse entendre que les "illusions" et les "apparences" soient distinctes, alors ces derniers concepts seraient inintelligibles.

Lorsque des néo-mystiques déclarent que l'homme ne peut jamais connaître les faits de la réalité, ce qu'ils déclarent est que l'homme n'est pas conscient. Si l'homme ne connaît pas les faits de la réalité, alors il ne connaît rien - parce qu'il n'y a rien d'autre à connaître. S'il ne peut pas percevoir l'existence, il ne peut rien percevoir du tout - parce qu'il n'y a rien d'autre à percevoir. Ne rien connaître et ne rien percevoir, c'est être inconscient. Mais parvenir - à la suite d'un enchaînement complexe de raisonnements et d'une longue série de concepts tels que la "connaissance", la "perception", la "preuve", l'"inférence", la "démonstration" - à la conclusion qu'on ne serait pas conscient, c'est difficilement admissible du point de vue épistémologique.

"'Nous savons que nous ne savons rien', jacassent-ils, faisant l'impasse sur le fait qu'ils sont justement en train de prétendre savoir quelque chose. 'Il n'y a pas d'absolu', clabaudent-ils, sans voir qu'ils sont justement en train d'énoncer un absolu. 'Vous ne pouvez pas prouver que vous existez ou que vous êtes conscient', cancanent-ils, oblitérant le fait que la preuve présuppose l'existence, la conscience, et un réseau complexe de connaissances interdépendantes. L'existence de quelque chose à connaître, d'une conscience capable de l'appréhender, et d'un savoir qui aurait appris à distinguer entre des concepts tels que 'prouvé' ou 'non prouvé'" (Atlas Shrugged).

L'existence existe (ce qui est, est) et la conscience est consciente (l'homme est capable de percevoir la réalité) - ces axiomes sont à la base de toute la connaissance humaine, de tous les concepts humains. Lorsque les néo-mystiques les contestent ou les nient, absolument tous les concepts dont ils se servent par la suite sont volés. Ils n'ont droit qu'aux concepts qu'ils pourraient déduire de la non-existence au moyen de l'inconscience.

Il est rationnel de demander : "-- comment peut-on accéder à la connaissance ?". Il n'est pas rationnel de demander : "-- est-il possible d'accéder à la connaissance ?" - parce que la possibilité de poser la question présuppose une connaissance de l'homme et de la nature de la connaissance. Il est rationnel de demander : "-- qu'est-ce qui existe ?" Il n'est pas rationnel de demander : "-- est-ce que quelque chose existe ?" parce que la première chose sur quoi il faudrait fermer les yeux est l'existence de la question et celle d'un être qui est là pour la poser. Il est rationnel de demander : "-- comment les sens permettent-ils à l'homme de percevoir la réalité ?" ; il n'est pas rationnel de demander "-- est-ce que les sens permettent à l'homme de percevoir la réalité ?" - parce que s'ils ne le font pas, par quels moyens le locuteur a-t-il acquis sa connaissance des sens, de la perception, de l'homme et de la réalité ?

On peut observer un des plus grotesques exemples de vol de concepts dans l'affirmation courante - faite par des néo-mystiques aussi bien que par des paléo-mystiques - suivant laquelle l'acceptation de la raison reposerait en dernière analyse sur "un acte de foi".

La raison est la faculté qui identifie et intègre les matériaux fournis par les sens. La foi consiste à accepter des idées sans preuve sensorielle ni démonstration rationnelle . Avoir "foi en la raison" est une contradiction dans les termes. "La "foi" est un concept qui n'a de sens qu'en opposition à la raison. Le concept de "foi" ne peut pas précéder la raison, il ne peut pas fournir le fondement d'une acceptation de la raison. C'est une révolte contre la raison.

C'est en vain que l'on cherchera un seul exemple d'attaque contre la raison, contre la perception sensorielle, contre le statut ontologique des lois de la logique, contre l'efficacité cognitive de l'esprit humain, qui ne soit pas fondé sur le sophisme du vol de concepts.

Le sophisme consiste dans le fait de se servir d'un concept tout en méconnaissant, contredisant ou niant la validité des concepts dont, logiquement, il dépend. Ce procédé sophistique doit être reconnu et rejeté par tout penseur, si ce sont la vérité et la réalité qu'il recherche. A moins d'une telle reconnaissance, à moins d'un tel rejet, les vannes sont ouvertes pour la plus mortelle des formes du mysticisme : le mysticisme qui se donne pour "scientifique".

Qui sont les victimes de ce néo-mysticisme ?

Eh bien, tout étudiant qui s'inscrit à des cours de philosophie, qui cherche ardemment une conception rationnelle et complète de l'homme - et que l'on conduit à abdiquer sa conviction que son esprit peut avoir une efficacité quelconque ; ou qui, dans le meilleur des cas, abandonne la philosophie avec dégoût et mépris, en conclut qu'il s'agit d'une charlatanerie pour poseurs intellectuels, et accepte ainsi cette croyance tragique que la philosophie n'aurait aucune importance pratique pour la vie de l'homme sur terre.